« Sisu, de l’or et du sang », vaste huis clos d’action contemplative

Sisu, de l’or et du sang
de Jalmari Helander
Action, Guerre
Avec Jorma Tommila, Aksel Hennie, Jack Doolan
Sortie le 6 septembre 2023

Tandis que John Wick vient de ranger les revolvers, la Finlande semble déjà vouloir lui trouver un successeur !

Voilà donc que sort sur nos écrans Sisu, tirant son nom d’un mot finnois intraduisible et désignant une forme de courage extrême, ainsi qu’une incroyable détermination apparaissant lorsque tout espoir semble perdu.

En 1944, en Laponie finlandaise, un ancien soldat reconverti en chercheur d’or découvre une quantité impressionnante du précieux métaux. En chemin vers la ville où il compte monnayer sa découverte, il rencontrera un contingent nazi désireux de s’accaparer son butin. Pour survivre et protéger son or, l’homme devra réveiller le Sisu qui sommeille en lui.

Avec un budget dérisoire de six millions d’euros, Sisu parviendra à réaliser le tour de force consistant à livrer un film d’action pseudo-historique aux accents postapocalyptiques. La colonne de soldats nazis traversera ainsi des paysages désolés rappelant La Charrette fantôme de Salvador Dali ou le film éponyme du suédois Victor Sjöström. Leur pas lent et leurs uniformes rapiécés, couverts de la poussière d’un interminable désert donneront l’impression d’une armée spectrale, voyageant entre la vie et la mort. Les vastes étendues vides et désolées servant de décors à l’action renforceront également cette sensation, rappelant quant à elles le Mad Max : Fury Road de George Miller.

Cependant, le peu de protagonistes apparaissant à l’écran (18 acteurs seulement) et l’absence de variété des décors donneront à l’ensemble des allures de huis clos, créant une œuvre paradoxale : à la fois vaste et intimiste !

Mais derrière une violence décomplexée, Sisu réalisera l’étrange tour de force consistant à livrer une œuvre presque contemplative, tandis que le premier dialogue n’interviendra que douze minutes après le début du film. Ce silence n’empêchera pourtant pas le réalisateur Jalmari Helander d’installer intelligemment son univers, le film s’ouvrant sur le héros creusant un trou alors que l’on entend la guerre au loin ; comme une façon de poser l’intrigue par le biais d’un plan fixe mais néanmoins parfaitement représentatif de la tonalité générale du métrage.

Plus encore, le film n’oubliera pas de construire subtilement sa diégèse en désamorçant la potentielle absence de réalisme par une ficelle scénaristique : le héros ne veut pas mourir, et son passé de soldat renforcera cette logique en laissant entendre qu’il aura bien souvent échappé à la mort.

En conclusion, Sisu parvient à remplir sa mission, en livrant un film n’ayant pas à rougir de lui-même. La photographie est très belle – et rappelle à certains égards le Fury de David Ayer –, l’action est percutante, inventive, les atmosphères oppressantes, le héros intrigant et déterminé, la réalisation soignée, cohérente et audacieuse dans son absence de dialogues. Une étonnante surprise et un bol d’air frais dans le cinéma d’action !