« SamouraÏ », Fabrice Caro passe dan de la dérision

Titre : Samouraï
Auteur : Fabrice Caro
Editions : Folio
Date de parution : 17 août 2023
Genre : Roman

Après avoir signé en 2018 le manifeste du traumatisme post-rupture, Fabrice Caro s’attaque à l’éprouvante rééducation affective. Votre existence peut vite tourner au défilé Tinder non consenti quand un couple d’amis trop bénévoles vous force le chemin de la guérison sentimentale. Mylène, Chloé, Louise. Dans Samouraï, elles donnent leur nom aux chapitres, mais pour Alan une seule voix compte et c’est celle de Lisa. Celle qui, en quelques mots, lui a asséné le coup de grâce ; « tu devrais écrire un livre sérieux ». Comme quoi, le point final d’une relation peut aussi être le début d’une grande épopée littéraire. C’est décidé. Dans son prochain roman, l’écrivaillon troquera la satire familiale bien grasse pour une plongée dans le passé migratoire de ses ancêtres. Sol y sangre incarnera la douleur de l’exil transmise de génération en génération. Ce sera fort. Puissant. Et même s’il n’en a pas encore écrit une ligne, il connaît déjà les réponses qu’il donnera à Claire Chazal pour toucher Lisa quand, affalée sur son snobinard d’universitaire devant la télévision, elle maudira ses choix amoureux. Mais en attendant, il faut écrire. Et puis, surveiller la piscine des voisins…

À force d’entendre se plaindre à la première personne du singulier ce même personnage de quarantenaire cafardeux contre lequel la vie s’acharne, non sans cynisme, on finit presque par se demander qui est Fabrice Caro. Après tout, on dit que les écrivains se glissent toujours un peu dans leurs ouvrages. Alors, quarantenaire, oui (du moins à la sortie du livre). Célibataire et dépressif, on l’ignore. Mais une chose est sûre, l’auteur de Zai zai zai zai – vendu à plus de 180 000 exemplaires –  ne doit pas ramer autant que son (anti-)héros dans les eaux tumultueuses du marché de l’édition. L’entreprise FabCaro assure des publications chaque année, avec un public toujours aussi conquis par son humour.

Car pour être comique, ça il est comique. Pas d’exilés espagnols dans Samouraï. Mais un bourgeois créatif et semi-dépressif dont on se moque avec une pointe d’amertume. En samouraï aguerri, Fabrice Caro obéit à la voie d’un certain style d’humour en respectant un code (d’honneur) parfois critiqué pour ses automatismes. Alors oui, l’auteur ne surprend plus. Mais pour autant, il affûte son style. En comparaison avec Le Discours qui, sur la fin, dégoulinait d’apitoiements, jusqu’à en devenir un peu écœurant, Samouraï est mieux dosé. Et c’est probablement parce qu’au lieu d’épuiser son sujet, il en fait une raison d’en aborder d’autres. À moins que ce ne soit l’invasion de notonectes, présage des ravages qui menacent la piscine des voisins, bientôt surnommée Glauqueland. Quoiqu’il en soit, on rit un peu plus et surtout un peu mieux.