Monstera : Quand l’apparence devient souffrance

Scénario : Simon Roure
Dessin : Simon Roure
Éditeur : Virages graphiques
Sortie : 20 mars 2024
Genre : Roman graphique

La monstera est une plante vivace qui tirerait son nom du terme latin signifiant monstre. Pourtant cette pousse aux feuilles inhabituellement trouées, et qui décore la majorité des salons, n’a rien de repoussant. Pas plus que Lina et Gabriel, quoiqu’ils puissent en penser. Gabriel se sent obligé de traiter son corps plus durement depuis qu’entre deux chutes de longboard, il s’est fait repéré par un directeur de casting spécialisé dans le mannequinat. Lina oublie sa faim en se donnant corps et âme au sport. Ils sont en plein âge de la floraison. Mais ils se laissent fanés, trop obnubilés par leur propre reflet. Rien n’a d’importance si ce n’est l’apparence. Ils se le répètent comme un mantra. Un slogan placardé dans toute la ville sous la forme d’injonctions publicitaires.

Que dire de Monstera ? Indéniablement, il est, à l’image de Gabriel, le fruit d’un esthétisme très contrôlé. Plaisant à regarder. Ses traits sont aériens, joliment perturbés par le fusain. Des aplats d’indigo comblent les vides et adoucissent les noirs. Simon Roure s’amuse à isoler la lumière dans ses ambiances bleutées comme si tout l’album se passait à l’aube de la nuit.

Quelque peu superficiel

Monstera n’est pas qu’un bel enrobage. Et pourtant, on le trouve quelque peu superficiel. Pas dans sa manière de raconter, mais dans ce qu’il raconte. Gabriel bégayant devant une caméra que le longboard n’est pas un skateboard, on y croit. On s’amuse de le voir crier pour couvrir le son des basses dans une soirée entre amis. Notre éphèbe est convaincant. Touchant même. Mais il donne une représentation légèrement clichée de toute une génération. Son idéalisme est ébranlé par sa soif de reconnaissance. Il ne participe plus aux manifestations pour le climat, accaparé par ses séances de shooting. S’il avait auditionné pour interpréter la caricature parisienne de la GenZ, avec son look arty et son mal-être générationnel, il aurait sans nul doute décroché le rôle. Mais malgré ses raccourcis légèrement grossiers, Simon Roure énonce des vérités. Les angoisses qu’il évoque sont réelles et encore trop incomprises de ceux qui n’ont pas grandi face aux écrans. Quelles que soient ses faiblesses, Monstera connecte avec son public.