« Titane », quand la violence mute en amour

Titane
de Julia Ducournau
Drame, Fantastique, Thriller
Avec Vincent Lindon, Agathe Rousselle, Garance Marillier
Sorti le 28 juillet 2021

Après son court-métrage Junior et Grave son premier long (présenté en compétition à la Semaine de la Critique en 2016), Julia Ducournau revient avec Titane, fraîchement récompensé par la Palme d’Or de l’édition 2021 du Festival de Cannes.

Le bruit vrombissant d’un moteur, une voiture s’engouffrant contre un bloc de pierre et la pose d’une plaque de titane dans un crâne brisé : dès les premières minutes, le film nous attrape à la gorge en nous introduisant le personnage de Alexia (Agathe Rousselle), une serial-killeuse qui croise la route de Vincent (Vincent Lindon), un pompier dont le fils est porté disparu depuis 10 ans.

Après une vingtaine de minutes de bruit et de colère dévastatrice, Titane dévoile cette rencontre entre deux personnages que tout oppose mais qui malgré la méfiance, le mutisme et les confrontations des débuts apprendront à s’aimer.

Et c’est à ce moment-là que le film surprend et se dirige vers autre chose que le slasher qu’il semblait vouloir proposer. Mélangeant aussi bien les codes du body-horror, que du drame familial et de la comédie, Julia Ducournau impose une vision unique dans le paysage cinématographique français et s’affranchit de ses références (on pense évidemment au Crash de David Cronenberg). Le tout aidé par l’interprétation physique et nerveuse de Agathe Rousselle, repérée sur Instagram et dont c’est le premier rôle, face à un Vincent Lindon impressionnant, tout en muscle et en fragilité.

En résulte une expérience sensorielle viscérale et éprouvante qui laisse s’exprimer le récit au son et à la vue des corps qui se déforment, dansent, s’enlacent, des tympans qui se perforent, des os qui se brisent et des fluides qui jaillissent. Et bien que ces corps soient souvent maltraités, Ducournau n’oublie jamais de les sublimer et délivre une œuvre marquante – mais surtout moins noire qu’elle ne le semble – sous forme d’ode à l’acceptation de soi et des autres.

Avec sa Palme d’Or, Titane vient donc couronner près d’une année de rayonnement du cinéma de genre francophone (avec La Nuée de Just Philippot, Teddy des frères Boukherma ou même Oxygène d’Alexandre Aja). Dans l’espoir de voir, dans les prochaines années, de plus en plus de projets hybrides et jusqu’au-boutiste de cette qualité envahir les salles obscures.