To play or not to play : quand le rêve devient réalité

Mise en scène et écriture de Thierry Debroux. Avec Daniel Hanssens et Othmane Moumen ainsi que Jean-Philippe Altenloh, Jacqueline Bir, Thierry Janssen, Anouchka Vingtier, et les enfants Ava Debroux et Lily Debroux. Du 8 septembre au 24 octobre 2020 au Théâtre Royal du Parc. Crédit photo: ZvonocK

Portez-vous bien votre masque ? Vous lavez-vous les mains régulièrement ? Avez-vous un proche malade ou décédé du COVID-19 ? Êtes-vous malade vous-même ? Sans doute sommes-nous beaucoup à pouvoir répondre « oui » à la plupart de ces questions. Cependant, une autre se pose, primordiale… Souhaitez-vous que ces « oui » définissent désormais votre vision de la vie ? A cette question, il semblerait que Thierry Debroux ait répondu un « non » ferme et définitif. A travers sa pièce To play or not no play, nous retrouvons certes le thème qui nous préoccupe tous ces derniers temps, mais ce que nous retrouvons surtout, c’est notre âme d’enfant et nos rêves d’antan.

Le spectacle est lancé depuis la salle. Un personnage singulier au masque d’oiseau longe le public jusqu’à la scène, il arbore son déguisement comme si chacun de nous était pestiféré. L’ambiance est sombre, mais de circonstance. Pas un mot ne sort de son bec noir, mais soudain il se met à danser, agitant sa baguette dans tous les sens. Les lumières révèlent quelque peu la scène, le rideau se lève et pendant que l’oiseau danse, nous découvrons un homme, affalé dans son canapé, endormi. Puis, l’oiseau casse sa baguette dans un geste lourd de sens, et part. La période sombre semble se terminer. C’est d’ailleurs ce que la pièce entière semble nous dire. Si elle débute sur la solitude d’un homme plein de doutes, elle se clôture sur un homme neuf qui a pu faire d’un rêve une réalité, véritable message d’espoir.

Daniel Hanssens est directeur de théâtre. Il s’y est d’ailleurs confiné, dans son théâtre à l’italienne. De quoi nous ramener au mois de mars dernier. Il est seul, sur son canapé, avec sur scène un frigo pour seule compagnie. Cependant, un téléphone sonne, le réveille et soudain, il n’est plus seul. Dans le costume d’un aviateur bien connu, Othmane Moumen rejoint le petit prince en son royaume au rideau rouge… en sortant du frigo. Rêve-t-il encore ? Est-il fou ? Nous ne prenons même pas la peine de nous interroger tant les jeux d’acteur nous séduisent. Toujours est-il que ce fameux directeur, d’étape en étape et tout en respectant les règles sanitaires en vigueur – non sans nous permettre d’en rire au passage – finit par arriver au bout de sa folie rêvée : monter « Hamlet ». Et quel Hamlet ! Thierry Debroux ne laisse rien au hasard. Si les acteurs ne peuvent plus venir à la scène, c’est la scène qui viendra aux acteurs. C’est donc en projection sur un support impromptu qu’apparaît le reste de la troupe censée jouer du Shakespeare, au fur et à mesure du recrutement du directeur du théâtre et de son ami imaginaire. Et tout au long du spectacle, les acteurs nous tiennent en haleine.

Si, en ces temps sombres pour le monde du spectacle, certains sortaient déjà leurs pelles pour enterrer le théâtre, c’est bien vivant et dans une forme olympique que ce dernier se révèle au Théâtre Royal du Parc avec To play or not to play. Toutefois, si le théâtre peut vivre, ce n’est pas seulement à ses acteurs qu’il le doit, mais également à ses spectateurs. Il n’est néanmoins pas nécessaire de vous rendre à cette pièce simplement pour soutenir les théâtres, non, allez-y plutôt parce que cette pièce le mérite. Allez-y pour rire avec les acteurs, pour soupirer et rêver avec eux, allez-y pour oublier que vous portez un masque ou que la salle est presque vide, COVID oblige. Parce que si ce vendredi la salle s’est levée pour applaudir, ce n’est pas seulement pour soutenir l’écrivain et ses acteurs, mais pour les remercier.