« Les philosophes et l’amour », ou la philosophie de l’amour comme un territoire à réinvestir

Titre : Les philosophes et l’amour
Autrices : Aude Lancelin et Marie Lemonnier
Editions : Plon
Date de parution : 8 juin 2023
Genre : Essai

Dans Les philosophes et l’amour, Aude Lancelin et Marie Lemonnier s’attaquent à l’idée reçue selon laquelle l’amour ne serait pas un objet pour les philosophes. L’ouvrage propose ainsi de contribuer à y remédier. Platon, Montaigne, Jean-Jacques Rousseau, Emmanuel Kant ou encore Friedrich Nietzsche sont autant d’auteurs dont le rapport à l’amour est analysé à travers dix chapitres courts et à l’écriture directe. Quelques duos sont aussi étudiés, comme celui formé par Martin Heidegger et Hannah Arendt.

L’amour comme sujet d’intérêt universel

L’amour est-il d’abord charnel ? Est-il au contraire d’abord intellectuel ? Faut-il avoir plusieurs amours pour ne pas être esclave d’un seul ? L’amour est-il réellement désirable ? La souffrance est-elle inévitable lorsqu’il est question d’amour ? L’amour est-il une passion artificielle, une simple pratique sociale ? Peut-on véritablement évaluer le succès ou l’échec d’un amour ? Pourquoi se met-on dans des situations amoureuses impossibles ? Telles sont certaines des interrogations soulevées par l’ouvrage, qui restitue pour se faire la pensée de philosophes à ce sujet. Il propose ainsi des angles de vue sans se prononcer définitivement, bien que des préférences se font sentir. Il rejoint des problématiques contemporaines comme le consentement ou la réciprocité du désir et des sentiments.

Les philosophes sont des êtres humains comme les autres

Les philosophes et l’amour a ceci d’inédit qu’il présente les philosophes sous un jour dont nous avons peu l’habitude. D’une part, parce qu’il est exclusivement question d’amour. D’autre part, parce qu’il s’intéresse aussi à leur vie privée. Nous y apprenons des éléments souvent peu connus de leur biographie, qui sont à la fois intéressants pour ce qu’ils révèlent des êtres humains qu’ils et elles ont été, et en même temps nécessaires à la compréhension entière de leur pensée. Autrement dit, ici, nous ne distinguons pas l’homme de l’artiste. Cet exercice n’est pas toujours très flatteur, même s’il est souvent mené avec humour. En effet, les philosophes -qui sont dans l’ouvrage majoritairement des hommes- ne parviennent pas forcément à s’appliquer à eux-mêmes leurs propres théories. Il existe parfois de véritables contradictions entre leurs discours et leurs actes. Certains ont été de véritables misogynes, des époux infidèles ou encore des pères totalement absents quand bien même leurs écrits visaient à fournir des conseils dans ces matières.

Finalement, l’ouvrage Les philosophes et l’amour amène un petit vent de fraîcheur dans la philosophie telle que l’on a tendance à la voir et à en parler. Déjà, il nous révèle des « potins » sur la vie privée des philosophes, autrement dit des intellectuels surtout connus et estimés publiquement pour leur pensée sur divers sujets. Ensuite, ces révélations portent sur l’amour, sujet qui suscite un intérêt universel depuis toujours et sûrement pour toujours. Au passage, il nous pousse à nous pencher sur nos propres expériences et notre propre rapport à l’amour. Face à lui, nous sommes tous et toutes des êtres humains tributaires de nos biographies et de notre époque.