La fièvre d’Urbicande: un message toujours actuel

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Scénario : Benoît Peeters
Dessin : François Schuiten
Éditions : Casterman
Sortie : 28 octobre 2020
Genre : Fantastique

Album majeur de la bande dessinée franco-belge, La fièvre d’Urbicande fait l’objet d’une réédition cette année à l’occasion de sa mise en couleur par le talentueux graphiste Jack Durieux. Loin de dénaturer l’œuvre originale de François Schuiten et Benoît Peeters, celle-ci s’en trouve sublimée.

Urbicande. Une ville altière, majestueuse, conquérante. Si ses lignes d’une pureté sans pareille font l’admiration de tous, l’urbatecte Eugen Robick, l’un des grands artisans de ce rayonnement architectural, est néanmoins insatisfait. La Commission des Hautes Instances, véritable gouvernement d’Urbicande, lui refuse l’aménagement dans la cité d’un troisième pont qui, prétend Robick, rétablirait un équilibre urbain gravement menacé. C’est dans ce contexte de tension politique et émotionnelle qu’un étrange objet fait son apparition sur le bureau de Robick : une structure cubique évidée d’origine inconnue, faite d’un métal apparemment indestructible, et qui commence lentement à croître et proliférer…

Architecture totale

Dans La fièvre d’Urbicande comme dans tous les albums des Cités obscures, c’est la ville elle-même qui joue le rôle du personnage principal. Cette cité à l’architecture parfaite, joyau du style Art déco nous fait penser au caractère grandiose de ce qu’avaient imaginé certains futuristes italiens ou plus tard une architecture nazie ou stalinienne, tout à la gloire de la puissance de l’Etat. Une ville dans laquelle les habitants ne sont que des pions, à la merci des commissaires du gouvernement. La fièvre d’Urbicande évoque donc un monde totalitaire dans lequel on retrouve des similitudes avec celui imaginé par Orwell dans 1984 ou Terry Gilliam dans Brazil, un univers qui va se trouver bouleverser par l’apparition d’un cube.

Un grain de sable

Et ce cube nous en dit beaucoup sur nos sociétés actuelles. Outre son rôle de grain de sable dans une machinerie parfaite, ce cube nous montre aussi à quelle vitesse nous pouvons être submergé par un élément extérieur et resté sans voix face aux forces de la nature. Alors que l’on essaie de se convaincre que nous vivons dans une société où l’on peut avoir la maîtrise totale sur sa vie et ses actions, l’expérience récente de la pandémie mais également les nombreux phénomènes naturels qui se sont abattus sur la planète ces dernières années démontrent par l’absurde que nous sommes peu de chose face aux forces qui nous entourent.

Au final, relire La fièvre d’Urbicande, c’est se plonger dans une passionnante aventure dystopique qui nous interroge sur notre présent tout en redécouvrant les beautés d’Urbicande sublimées par la mise en couleur de Jack Durieux. Un chef d’œuvre à redécouvrir d’urgence donc.

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