« Euphorie », un titre on ne peut plus ironique pour une figure on ne peut plus iconique…

Titre : Euphorie
Autrice : Elin Cullhed
Editions : 10/18
Date de parution : 17 août 2023
Genre : Roman biographique

Avec son Euphorie, Elin Cullhed nous propose un roman virtuose sur les derniers mois de vie de l’autrice américaine Sylvia Plath.

A cette époque en 1962, Sylvia Plath vit dans le Devon avec son époux, l’auteur anglais Ted Hugues. Ils ont une fille et leur fils est sur le point de naître. Sur papier, leur existence dans la campagne anglaise vend du rêve : tout le monde il est beau et amoureux, on écrit, on est publié et on a toute la vie devant soi. Sauf que cette couche de vernis rose s’effrite à mesure que la jalousie et les problèmes d’égo s’invitent au sein du couple. Sans compter la personnalité torturée de Sylvia Plath, qui lui avait déjà valu un séjour hospitalier après sa première tentative de suicide.

Elin Cullhed n’est pas la première à s’être penchée sur cette célèbre poétesse –citons notamment Gwenaëlle Aubry – mais c’est peut-être la première à endosser la personnalité de Sylvia Plath avec tant d’empathie, et ce n’est pas rien de le dire ! Après lecture de ce roman en « je » qui semble lui coller encore plus à la peau, on espère de tout cœur que l’autrice suédoise se porte bien ! En effet, même si tout au long du roman on souffre avec Sylvia Plath, on perçoit qu’Elin Cullhed y a mis toutes ses tripes pour écrire avec tant de conviction. Etre auteur, est loin d’être une sinécure les amis!

Ce texte d’une tristesse infinie fait heureusement l’impasse sur l’ultime épisode de la vie de la poétesse qui a mis fin à ses jours en se calant la tête dans un four. Délicatesse de l’autrice qui nous a évité un trop plein d’intensité et de voyeurisme.

Le roman se base principalement sur la relation de Ted et Sylvia. On ne peut s’empêcher de prendre parti, tant cette relecture fusionnelle est émouvante. Elle renforcera également les nombreuses interrogations qui planent depuis des décennies : le suicide de la poétesse trouve-t-il racine au plus profond de son mal-être psychique ou dans la détresse causée par un mari violent ? Peut-être un peu des deux. Quoi qu’il en soit, ce roman nous procure un immense regret, celui de n’avoir pu lire davantage de textes de Sylvia Plath, décédée à seulement 30 ans.

Notons également le style superbe à la fois simple et pourtant recherché, cru voire même bestial par moments. Chose troublante : on retrouve dans ces caractéristiques très précises la base de l’écriture de Sylvia Plath dans son unique roman, La Cloche de détresse, publié quelques semaines avant son suicide. Nous n’avons donc qu’un mot : bravo ! A l’autrice, mais également à la traductrice, Anna Gibson, qui aura elle aussi réussi un tour de force pour la retranscription de cette langue si belle et si forte.

En bref :

Si vous aimez la littérature, ce livre est pour vous.

Si vous aimez les romans biographiques, ce livre est pour vous.

Si vous n’avez pas le moral, ce livre n’est absolument pas pour vous !

Mais attendez d’aller mieux et savourez ce bijou d’écriture…