Descendre aux Riches Claires : la douleur des enfants placés

© Bartolomeo La Punzina

De François Badoud, avec François Badoud et Camille Raséra. Du 4 octobre au 20 octobre 2023 au Théâtre des Riches Claires.

Cela se passe en Suisse. Ils sont frère et sœur mais très longtemps il ne l’a pas su. C’est différent pour elle. Quelques années les séparent et elle s’est occupée de lui quand il était tout petit. Leur père étant parti, l’argent manquait. Elle avait 5 ou 6 ans quand la décision fut prise. Elle irait en famille d’accueil, lui, chez les Bonnes Sœurs. A présent, le décès de leur mère les a réunis. Ils partent en randonnée dans la montagne. C’est cette promenade qui nous est contée. L’histoire de cette rencontre, après tant d’années, et surtout le récit du passé. Des retrouvailles pleines d’émotions, des récits très chargés. Au-delà de ça, une dénonciation des pratiques de la Suisse avant 1981.

Passé dramatique

A priori, elle (Camille Raséra) a eu plus de chance que lui (François Badoud). Après 1 an, elle est revenue à la maison. Sauf, qu’elle l’aimait déjà beaucoup et qu’elle l’a perdu, du jour au lendemain. Lui en a été moins conscient. Peut-être sur le moment, mais le souvenir a disparu. Il ne savait pas qu’il avait une sœur. Mais elle, elle n’a pas compris pourquoi il n’est jamais venu la retrouver, elle croyait qu’il viendrait à sa majorité. Peut-être que les sœurs étaient contentes d’avoir de la main d’œuvre gratuite.

Le nouveau mari de la mère n’a pas voulu qu’il revienne. Alors, à 16 ans, elle était rachitique, elle ne mangeait plus. Elle a fui à Zurich où elle a rencontré un étudiant en cinéma. Le grand amour qui a tourné au drame, jusqu’à l’internement. Une vraie descente aux enfers.

Lui a subi les châtiments corporels, coups, cris et pleurs. Après les Bonnes Sœurs, il est transféré chez les Frères. Séjour qui entrainera une demande de pardon du gouvernement Suisse « Vous n’êtes en rien coupable de ce que vous avez subi ».

Placements d’enfants et internements administratifs

Peut-on enterrer un tel passé ? Ils sont ravagés. Comment pourraient-ils ne pas l’être ? Pourront-ils se reconstruire ? La pièce porte sur le passé, pas sur le futur. Ce qui est sûr c’est qu’ils sont en manque. De tendresse, d’amour. François Badoud, acteur et auteur de la pièce, souhaitait évoquer les internements administratifs des personnes qui menaçaient l’ordre public et les placements d’enfants organisés par la Suisse jusqu’en 1981. C’est le sujet de la pièce, dense et dramatique, qui, pourtant, ne parvient pas vraiment à captiver autant qu’elle le devrait. Malgré tout, un récit intéressant qui invite le spectateur à vouloir en apprendre plus sur le passé sombre de ce pays, et surtout, sur les centaines de milliers de personnes qui en ont été victimes. La pièce, quant à elle, est une fiction.