« La Traversée », l’exil à hauteur d’enfants

La Traversée
de Florence Miailhe
Animation, Drame
Avec les voix d’Emilie Lan Dürr, Florence Miailhe, Maxime Gémin
Sorti le 30 mars 2022

« Rien n’est tout noir, rien n’est tout blanc, ma cocotte. La vie c’est gris. Si tu veux t’en sortir, faudra bien que t’apprennes à voir en gris »

Kyona, 13 ans, quitte son village pour la première fois de sa vie. Fuyant les exactions de violentes milices, ses parents espèrent trouver un avenir meilleur de l’autre côté de la frontière. Rapidement séparée d’eux et de ses plus jeunes frères et sœurs lors d’un contrôle ferroviaire, Kyona doit poursuivre  la route seule avec son frère de 12 ans, Adriel.

A travers ce premier long-métrage, l’autrice et artiste Florence Miaihle entendait « raconter la permanence de l’histoire des migrations ». Si le sujet peut sembler difficile à aborder au sein d’un film d’animation principalement destiné aux enfants, les choix de narration et de mise en images permettent de rendre le visionnage accessible à toutes les tranches d’âge. Le récit est en effet situé sur un continent imaginaire, à une époque indéterminée, et les personnages côtoyés au gré des périples appartiennent à différentes ethnies qui évoquent des populations réelles, sans qu’aucune ne soit explicitement mentionnée.

En adoptant le flou habituellement propre aux contes, le film réussit à évoquer aussi bien les figures salvatrices et les actes de bonté désintéressés que les dangers et les aspects plus sordides d’un tel périple. L’histoire est principalement racontée à travers les yeux de Kyona, dont le périple accompagne également son entrée dans l’âge adulte. Bien décidée à s’affirmer et à préserver sa liberté et celle de son frère malgré la précarité de leur situation, son regard sur le monde qui l’entoure et son rapport aux autres évoluent au fil des rencontres et des situations dont ils doivent s’extirper. Les deux enfants croisent la route d’une galerie de personnages plus ou moins ambivalents, tentant de les aider au mieux comme de tirer profit des circonstances.

La technique d’animation, reposant sur la peinture sur plaque de verre et le croquis au fusain, donne aux images un aspect de matière vivante et organique dont la palette de couleurs varie au gré des saisons et des environnements. Entre fauvisme, impressionnisme et abstraction,  les images se succèdent comme autant de tableaux mouvants, tantôt chaleureux et bariolés, tantôt grisâtres, sombres et menaçants.