Scènes de la vie conjugale ou la mécanique infernale du couple

De Myriam Saduis. Avec Nicolas Arancibia, Marion Eudes, Mathilde Marsan, Laure Valentinelli, Yoann Zimmer. Du 12 au 23 septembre 2023 au Théâtre Océan Nord. Le 7 février 2024 à la Maison de la culture de Tournai.

Quoiqu’on en pense, le couple reste la référence. C’est le modèle imposé par la société. Mais la vie conjugale peut aussi se transformer en vallée de larmes, prendre des allures de souricière. « Je préfère cette solitude à un mariage sans amour ». « Mon mari et moi nous nous paralysons, tout devient plus pauvre, plus terne ». Les couples finissent souvent par se déchirer, parfois avec une violence (verbale) intense.

En 1973, le réalisateur suédois Ingmar Bergman réalise pour la télévision six épisodes de Scènes de la vie conjugale, plongées dans les affres de la rupture. En 2020, le réalisateur israélien Hagai Levi reprend la série en inversant les rôles, c’est la femme qui quitte l’homme et non plus l’homme qui prend la tangente. Aujourd’hui, Myriam Saduis alterne et superpose les deux situations.

S’en suivent des dialogues étonnants, interpellants et révélateurs, permettant au public de ressentir les choses sans qu’elles doivent être soulignées. Deux couples se succèdent sur le plateau et échangent la même discussion. Les mêmes phrases, au mot près, n’ont pas la même résonance si elles sont prononcées par un homme ou par une femme. « Tant qu’à partir, autant partir pour de bon ». En abandonnant l’homme/la femme et les enfants. Mais il faudra parler de la pension alimentaire…

A travers cette adaptation, la metteuse en scène se penche sur la mécanique du couple, l’évolution du rapport femmes-hommes, « envisagé comme l’une des premières unités où se joue le pouvoir, dit-elle. Si ces rapports changent, toute la société changera. »

Myriam Saduis a travaillé sur ces variations avec des jeunes comédiennes et comédiens âgés entre 25 et 30 ans, issus pour la plupart de l’Esact à Liège : Nicolas Arancibia, Marion Eudes, Mathilde Marsan – particulièrement impressionnante dans une scène de colère – Laure Valentinelli et Yoann Zimmer. Cette nouvelle génération pose la question des rapports de force et de l’égalité des genres de façon plus affirmée que les précédentes. « Elle interroge sur les rapports interpersonnels, explique la metteuse en scène, et souhaite en créer de nouveaux ».

La mise en scène et la scénographie (signée Irma Morin) mettent en valeur le jeu des comédiennes et comédiens. Outre la succession des scènes identiques avec inversion des rôles, il y a aussi ces discussions séparées mais simultanées des couples où des bribes de dialogue passent d’une table à l’autre. La référence à la technique de cinéma (interview, gros plan) à l’origine du texte, est réalisée au travers de la visite des albums photo des couples. Des instantanés remarquablement réalisés par la photographe Marie-Françoise Plissart.