« Paternoster », quand l’homme fait disparaître la femme

Titre : Paternoster
Autrice : Julia Richard
Editions : HSN
Date de parution : 12 mai 2023
Genre : Roman

Dana est une jeune femme de 26 ans, seule, fraîchement célibataire et fragile. Le terreau parfait pour y faire germer une relation houleuse. Le soir même, elle rencontre Basil Paternoster et bercée malgré elle par l’alcool, la tristesse et des idéaux de couple éculés, elle couche avec lui puis tombe sous son charme. Pendant quelques mois, ils filent l’amour tendre et prometteur, puis arrivent les premières disputes, la rupture, la réconciliation et sans trop de transition, la rencontre avec la belle-famille.

Perdus dans la Dombes, les parents de Basil se sont figés dans une époque doucereuse, pesante et poussiéreuse. A deux et parfois trois, avec Théo, frère de Basil, ils font perdurer la tradition familiale Paternoster avec ferveur et décadence.

Bardées d’envies de se faire accepter coûte que coûte auprès de sa belle-famille, Dana va plonger tout son amour et son être dans l’acide de ces gens qui peu à peu vont l’emmener loin d’elle et de sa raison.

Autour de la piscine, ivre des verres de vin que lui offre en continu le patriarche, tendue par le comportement passif-agressif de sa belle-mère, Dana voit sa réalité chanceler. Elle doute, elle se questionne, ses certitudes se dissolvent et elle se trouve très vite dans un état d’hébétude qui la rend dangereusement malléable.

Paternoster, ce nom de famille pose les bases, ici, il ne sera pas possible d’exister en tant que femme, il faudra faire avec le mâle et le patriarcat. Il faudra aussi se plier aux normes de réussite sociale, il faudra se fondre, s’oublier, s’annihiler pour acquérir le droit au bonheur. Julia Richard dresse le portrait très touchant de Dana Mimouni, jeune algérienne kabyle, élevée par sa mère, abandonnée par son père, fragilisée à la racine par cette absence et stigmatisée à cause de sa classe sociale. On s’attache à elle, on s’y attache malgré les maladresses de rythme de l’histoire, les quelques lourdeurs de style, les quelques impressions d’essayer de faire rentrer au chausse-pied des constats actuels et important sur notre société.

Entre le journal intime un peu mièvre et le thriller efficace et prenant, Paternoster nous saisit moins par sa forme que par son fond, tout à la fois triste et nécessaire à traiter.