“Numéro deux”, histoire du déclin

Titre : Numéro deux
Auteur : David Foenkinos
Editions : Folio
Date de parution : 5 janvier 2023
Genre : Roman

« En 1999, débutait le casting pour trouver le jeune garçon qui allait interpréter Harry Potter. Ce roman raconte l’histoire de celui qui n’a pas été choisi ». Rien à faire, c’est vendeur. Et on peut même dire qu’au début, c’est prometteur. La potion prend et on se laisse glisser dans cette histoire qui commence par un vrai conte de fées pour écrivain amateur, la success story de J.K. Rowling. Foenkinos nous abreuve de fun facts que vient compléter son imagination et qu’on prend d’ailleurs un malin plaisir à vérifier pour savoir qui, de l’auteur ou du destin, est le plus fou. On est tantôt surpris du peu sur lequel s’est joué le rôle et tantôt amusé de voir comment le directeur de casting annonce la mauvaise nouvelle au numéro deux, de la même manière que s’il devait rompre avec une femme. Et c’est là qu’on sent que Foenkinos éprouve une joie certaine à nouer, non sans humour, la fiction au réel. On lui pardonne même son style parfois inutilement ampoulé – « Jeanne ne supportait plus l’Angleterre, terre des vestiges visibles de sa passion avortée » – tant le livre est un page turner et le plaisir de l’auteur, communicatif.

Malheureusement, la suite se gâte. Dès lors que l’histoire ne repose plus que sur l’imagination de l’auteur, le récit s’appauvrit. Martin Hill, le numéro deux, devient un être plaintif obsédé par l’échec et qui ne vit plus que dans le seul but d’éviter tout contact avec l’univers omniprésent d’Harry Potter. Après l’amusement, on cède à l’énervement et même parfois à l’ennui. Mais, à la limite, on pourrait voir dans cette fuite perpétuelle et impossible que met en scène l’écrivain, à la fois une forme de cynisme –  un humour de l’absurde – et une belle leçon, un peu façon développement personnel, sur le dépassement de ses propres peurs.

Non, le pire est définitivement à venir. En bout de course, le récit devient un véritable réservoir de clichés narratifs. L’écrivain ne nous épargne pas la très mièvre morale sortie tout droit d’un Disney : quel que soit le problème, l’amour est toujours salvateur. Et puis, atteignant son apogée dans un final plus qu’attendu, le livre confirme le déséquilibre dont il souffre. Peut-être aurions-nous été moins déçus si le début n’avait pas été si entraînant, si le casting d’Harry Potter ne nous avait pas autant fait vibrer que celui de Vincent Lacoste raconté par Riad Sattouf. Mais ceci dit, son manque de profondeur sur la fin n’en fait pas tellement un mauvais livre mais plutôt un livre qu’on ne lirait pas pour être surpris ou enchanté, davantage pour se détendre en vacances.