Démons me turlupinant au Rideau de Bruxelles

D’après le roman de Patrick Declerck, adaptation, conception et mise en scène de Antoine Laubin, avec Brice Mariaule, Hervé Piron

Du 6 au 24 janvier 2015 à 20h30 au Rideau de Bruxelles

Démons me turlupinant est à l’origine un roman largement autobiographique signé Patrick Declerck ; une autofiction, comme on dirait dans le jargon littéraire. Patrick Derclerck y remue une multitude de souvenirs très personnels, relatifs à son enfance, voire à sa petite enfance, mais également à son passage à l’âge adulte, sa relation avec les filles, avec sa fille, avec ses parents, ses grands-parents, et ainsi de suite. Il passe en revue, à la manière d’une longue séance psychanalytique, tous les sujets sensibles qui contribuèrent à faire de lui l’homme qu’il est devenu, ou le petit garçon névrosé qu’il était à cinq ans.

C’est ce roman introspectif, récompensé par le prix Rossel, que le Rideau de Bruxelles a choisi de porter sur scène. Pour ce, deux comédiens incarnent la voix de l’écrivain : Brice Mariaule et Hervé Piron. Leurs répliques sont, très majoritairement, issues du livre de Patrick Declerck, sans modifications préalables. En cela, les amateurs de Declerck n’auront guère à venir se plaindre ! Mariaule  et Piron déclament le texte tour à tour et se donnent la réplique, presque comme s’il s’agissait d’un dialogue alors qu’il n’en est rien : leurs voix ne sont que les deux facettes d’une seule et même pensée.

Ce faisant, les deux acteurs pataugent dans une mer de livres. Le plancher de la scène est presque entièrement recouvert de bouquins qui seront piétinés et malmenés tout le long du spectacle. Un autre aspect du décor tique également l’œil du spectateur : des étagères vides bouchent le fond de la scène. Au cours de la représentation, comme pour se donner consistance, les deux voix de Declerck vont remplir de livres les cases de ces étagères vides. C’est en quelque sorte le fil rouge du spectacle, à la manière des Pink Floyd qui érigent un mur au cours de leurs concerts. Et peu à peu, le sens de ce geste va apparaître au spectateur et prendre toute sa force. Cette mise en scène très réussie est signée Antoine Laubin.

Bien entendu, tout le monde n’appréciera sans doute pas le style de Declerck : son œuvre est très psychanalytique au sens freudien du terme, voire même au sens œdipien. On creuse, on gratte, on pinaille et on remue le passé dans tous les sens. Il y a des passages fort drôles, d’autres plus sérieux. Le texte est raconté avec beaucoup d’énergie, parfois peut-être même un peu trop. En effet, si l’on souhaite de temps à autre pouvoir méditer sur une pensée profonde, s’en imprégner quelques secondes, on ne nous en laisse pas l’opportunité : à peine un acteur a-t-il terminé sa tirade que l’autre enchaîne de suite, et cela sans répit durant presque deux heures. Aussi, malgré les qualités indéniables des acteurs, de la mise en scène et du texte de l’auteur, Démons me turlupinant une pièce qu’il vaut mieux aller voir à tête reposée !

A propos Ivan Sculier 67 Articles
Journaliste du Suricate Magazine

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  1. La revue de presse, tout de même. – De Facto

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