BRFF : Los Angeles, spectre douloureux

los angeles affiche

Los Ángeles

de Damian John Harper

Drame, Thriller

Avec Mateo Bautista Matías, Marcos Rodríguez Ruíz, Lidia García

Critique :

Mateo est un jeune mexicain de 16 ans habitant une communauté rurale de l’état d’Oaxaca, au Mexique. Bien en phase avec la dure réalité de son pays, il rêve de partir à Los Angeles. Mais pour se faire, il rejoint un gang local.

Los Angeles est un film unique de par sa conception travaillée de l’avenir des populations latino-américaines. De fait, les cinéphiles ont l’habitude de voir les Mexicains (et les Sud-Américains par extension) comme des malfrats décérébrés que la pauvreté a jeté à la rue du jour au lendemain. Les gangs latinos font d’ailleurs régulièrement les choux gras de documentaires en recherche de sensations fortes pseudo-exclusives.

Damian John Harper ne fait pas partie de ceux-ci. Pas question pour cet anthropologue de formation de tomber dans la facilité en agrémentant son récit de scènes d’action musclées faisant quelque part l’apologie du caïd.

Ce qu’il nous propose avec Los Angeles, c’est un cinéma vérité. Une tranche de vie filmée caméra à l’épaule qui n’exagère jamais, qui se retient quelques fois et qui sonne toujours juste.

En suivant le parcours de Mateo, le spectateur peut entrevoir toute la complexité d’un pays comme le Mexique. Une contrée balancée entre le poids des coutumes et l’envie de modernité. Mateo est le digne représentant d’une jeunesse en proie à la misère et donc au doute. Quoi de plus normal pour un Mexicain zapotèque que de rêver de liasses de dollars ?

Pour ce faire, Mateo rejoint un gang, groupement qui pullule dans la région, afin d’être aidé dans sa quête. Des gangs utiles, aussi surprenant que cela puisse paraitre. Et pour cause, ceux-ci font partie intégrante du paysage et possèdent une toute autre image que celle que nous lui accordons chez nous. Ces gangs ne sont pas pour autant appréciés, bien au contraire, mais ils semblent incontournables. La communauté a besoin d’eux et eux ont besoin de cette communauté pour vivre. Un amour-haine très ambigu.

Tout au long du récit, Damian John Harper développe son sujet de manière sobre et admirable. Sans rien spoiler du film, vous ne verrez jamais Los Angeles à l’écran, une volonté probable de jouer dans la métaphore, celle de l’endroit espéré mais inaccessible.

En résumé, Los Angeles est une réussite propre, efficace, originale et bien construite. Suivre Mateo tiraillé entre ses envies d’ailleurs et la société qui l’a vu grandir, c’est le pari réussi de Damian John Harper. Quelques scènes un peu expédiées sont certainement les seuls bémols de cette excellente production.

A propos Matthieu Matthys 919 Articles
Directeur de publication - responsable cinéma et littérature du Suricate Magazine.

Soyez le premier à commenter

Laisser un commentaire

Votre adresse de messagerie ne sera pas publiée.


*


Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.