Alice Guy, première réalisatrice de films

Extrait de la BD « Alice Guy » (Casterman, 2021)

Couverture de la BD « Alice Guy » (Casterman, 2021)

Scénario : José-Louis Bocquet
Dessin : Catel Muller
Éditeur : Casterman
Sortie : 22 septembre 2021
Genre : Roman graphique, biographie

Les bandes dessinées biographiques sont un genre en vogue et il faut avouer qu’il donne lieu à de très belles réussites. Alice Guy en est un bon exemple. Ce roman graphique très documenté mais aussi très bien scénarisé retrace de destin d’une pionnière du cinéma dont le nom a été éclipsé par les Gaumont, Méliés et autres Pathé. Un pavé de 400 pages qui se savoure comme un bon film !

La « petite dernière »

Née en 1873, Alice est le cinquième et dernier enfant d’un couple de Français installé au Chili. Ayant grandi entre le Chili, la Suisse et la France, elle se voit contrainte de chercher un travail pour subvenir à ses besoins après la mort de son père. Engagée comme secrétaire par Gaumont, elle participe à la transformation de l’entreprise. Alors spécialisée dans la photographie, Gaumont va devenir en quelques années un acteur clé du cinéma. La curiosité et le sens de l’initiative d’Alice font d’elle une employée indispensable dont les responsabilités sont progressivement élargies. En 1896, elle devient la première femme à réaliser un film !

Une carrière atypique

On ne peut pas s’empêcher de faire un parallèle avec la récente BD biographique George Sand, une fille du siècle. Comme Sand avant elle, Alice Guy est portée par un tempérament à la fois, curieux et impétueux et charmeur qui lui permet de réussir dans un milieu presque exclusivement masculin. Elle n’hésite pas à réaliser des films aux thèmes novateurs voire féministes, renversant par exemple les rôles des hommes et des femmes dans les scènes de la vie quotidienne pour créer un effet comique. Malheureusement, son mariage avec Herbert Blaché, âgé de presque dix ans de moins qu’elle, se révèle décevant. Après avoir tenté de s’implanter aux Etats-Unis, elle divorce et rentre à Paris en 1922. Peu après, elle abandonne ses grands projets dans le cinéma. Elle reste toutefois fortement marquée par cette expérience et la décrit dans ses Mémoires, dont la bande dessinée s’inspire en grande partie.

La naissance du cinéma

En plus d’offrir un magnifique portait de femme au tournant des XIXe et XXe siècles, Alice Guy raconte aussi la naissance du cinéma en France. On y apprend par exemple que Gaumont a longtemps été sceptique, estimant que les gens ne seraient pas prêts à payer pour une projection ! L’épisode du Bazar de la Charité est également évoqué : l’incendie d’un grand magasin parisien à cause de la négligence d’un projectionniste donne alors mauvaise presse au cinéma… Mais Alice Guy avait eu raison de croire en l’avenir du cinéma comme nouveau moteur de l’industrie du divertissement. Les passionnées d’histoire du septième art trouveront également leur bonheur dans l’annexe de 50 pages contenant une chronologie détaillée et diverses notices biographiques.

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