« The Painted Bird » : survivre parmi les Hommes

The Painted Bird
de Václav Marhoul
Guerre, Drame
Avec Petr Kotlar, Stellan Skarsgard, Harvey Keiter, Udo Kier
Sorti le 16 septembre 2020

Remarquable, bouleversant, déroutant, accablant, étonnant… Les qualificatifs ne manquent pas pour décrire The Painted Bird. Présenté en sélection officielle à la Mostra de Venise en 2019, le film a divisé le public, certains spectateurs auraient même tenté de quitter la salle. Il est vrai que par son sujet et ses images, et malgré ses grandes qualités, The Painted Bird, réalisé par Vaclav Marhoul, n’est pas à mettre sous tous les yeux.

Le réalisateur s’inspire du roman à succès L’Oiseau bariolé de Jerzy Kosinski et suit le parcours d’un jeune garçon, mutique, à travers les campagnes d’Europe de l’est et les malheureuses rencontres qu’il y fait, durant la Seconde Guerre mondiale.

Aussi, le film se divise en plusieurs chapitres, chacun portant le nom des personnages qu’il côtoie. Filmé en 35mm, dans un noir et blanc somptueux, les visages de l’humanité se transforment et rien ne semble épargner le jeune garçon, dont le prénom ne sera jamais prononcé.

Livré à lui-même, cumulant infortune sur infortune, passant d’un logement à un autre, d’un « gardien » à un autre, traversant des épreuves plus terribles les unes que les autres, il devra malgré tout survivre. Surmontant tour à tour l’abandon, la solitude, la maladie, la mort, la discrimination, la violence, tant physique que psychologique. Chaque nouvelle rencontre est espérée comme une forme de libération, mais n’apportera que son lot de malheurs supplémentaires. L’on pourrait arguer que le sort s’acharne de manière déraisonnée et que la violence, particulièrement brutale, paraît bien gratuite… Mais, par cette frontalité, Vaclav Marhoul présente une oeuvre qui met le spectateur face à une forme de réalité, sans détour, sans euphémisme, sans camouflage. La seule métaphore que l’on pourrait déceler est bien celle du titre. La volonté ne semble toutefois pas de susciter le malaise pour le simple plaisir.

Les performances des acteurs, l’on notera d’ailleurs les participations de Harvey Keitel et d’Udo Kier au casting, et particulièrement celle du jeune acteur principal, sont par ailleurs à mettre en valeur, criantes de vérité, pour un résultat d’autant plus déstabilisant.

Esthétiquement et thématiquement, l’on pense à Requiem pour un Massacre, à L’Enfance d’Ivan, ou encore à Marketa Lazarova. Là aussi, l’on suivait des enfants ou de jeunes gens livrés à eux-mêmes et confrontés aux atrocités que le monde peut révéler.

Vaclav Marhoul parvient à réaliser un film complexe, qui captive autant son spectateur qu’il ne le repousse par la dureté de ce qu’il lui montre, une vision d’horreur réelle. Image d’un monde et d’une époque, faisant montre d’une grande beauté visuelle, The Painted Bird est une réussite dont on se souviendra, particulièrement dérangeante.