Les envies sauvages : les limites de l’être et du paraître

De Céline Scoyer, mise en scène de Thibaut Nève,  avec Sarah Dupré et Thibault Packeu Du 9 au 25 octobre 2019 au Théâtre des Riches Claires. Crédit photo : Bartolomeo La Punzina

Avez-vous déjà songé à vous perdre loin de tout ? À fuir la société et ses dérives ? Avez-vous déjà simplement songé à la société et à ses dérives ? Alice et Romain, eux, l’ont fait. Perdue au fond d’un bois, une cabane retapée avec envie et anticipation accueille le projet d’évasion du couple. Un an. Douze mois. Trois-cent-soixante-cinq jours. Alors que leur entourage les croit en road trip en Asie, eux s’essayent en secret à la vie sauvage. Une question s’impose alors à nos esprits : se trouver loin de la société nous éloigne-t-il réellement de son influence ?

Sur scène, un décor simple mais chaleureux représente l’intérieur de leur petite cabane, à la fois chambre, salon, cuisine et salle à manger, avec des toilettes sèches et un garde-manger bien approvisionné. Près d’une table, de deux chaises et d’un lit, un vélo qui leur permettra de recharger leur petite batterie attire notre regard, nous présentant un univers particulier mais toujours ancré dans l’idée que la société pourrait s’en faire. Alice et Romain nous apparaissent alors et la pièce est lancée.

Romain est un youtubeur du dimanche qui est persuadé d’avoir eu l’idée du siècle et de devenir célèbre en réalisant un montage de leur escapade sauvage. Alice est présentée comme une utopiste et une artiste dans l’âme dont les outils sont la plume et la toile. Tous deux disent vouloir s’éloigner de tout ce qu’ils déplorent dans le monde : des malheurs de la guerre au gaspillage des ressources. Pourtant, l’un semble plus sincère que l’autre. Mais lequel ? Et d’ailleurs, sont-ils vraiment ce qu’ils laissent paraître ?

Entrecoupées des voix de leurs proches qui laissent des messages sur leurs répondeurs, les scènes s’enchaînent, liant l’isolement du couple à l’évolution parallèle de leurs pairs, comme s’ils n’avaient pas tout à fait quitté les pérégrinations sociétales. À travers les contradictions des discours et des actes», surpris par une chute relativement inattendue, nous sommes amenés à nous questionner sur l’origine des maux de notre société. Au fond, est-ce la société qui pervertit l’homme ou l’homme qui pervertit la société ?

Sous couvert d’un humour bienvenu quoique parfois un peu trop présent, nous tentons de comprendre la profondeur des mots de nos deux personnages sans toujours réussir à y plonger corps et âme. Malgré tout, la performance du jeu d’acteur nous entraîne dans leur univers et dans leurs questionnements, explorant les limites de l’acceptable.

Et vous, jusqu’où pensez-vous que vous mèneraient vos envies sauvages ?