Le Prodige : un film sur les « échecs » ?

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Le Prodige

d’Edward Zwick

Biopic, Drame

Avec Tobey Maguire, Liev Schreiber, Michael Stuhlbarg

Sorti le 25 novembre 2015

Le Prodige retrace l’histoire de Bobby Fischer à travers sa carrière en tant que joueur d’échecs. La narration commence dans les années 50 lorsqu’il entre dans son premier club et s’achève en 1972, date de son sacrement au titre de champion du monde, mais surtout, point de départ d’une seconde vie pour le jeune prodige. Peu ou moins documentée que celle traitée ici, elle doit pourtant être des plus passionnantes puisque, pour rappel, il disputera en 1992 la revanche contre Spassky, malgré l’embargo contre la Russie, qui lui vaudra son exil des Etats-Unis.

Il y a des films qui utilisent les effets de styles et d’autres qui s’en servent. Le Prodige se structure selon plusieurs types d’images. On commence par quelques animations 3D, pour imager la pensée du jeune garçon pendant ses parties d’échecs solitaire ; ludique. Puis viennent s’ajouter, au fils du récit, des images d’archives, on le suppose, sans grand intérêt pour la composition plastique ou narrative : quelques plans d’ensemble avant le début des tournois et tout d’un coup les personnages filmés à travers la caméra HD perdent en crédibilité.

L’engouement que pourra susciter la lecture du synopsis auprès des joueurs d’échecs ne sera que de très courte durée puisque le jeu n’agit finalement qu’en toile de fond pour dresser le portrait d’un homme à la dérive, Bobby Fischer. Bobby qui pourra même finir par inspirer du mépris au profit du camp adverse, sans cesse interrompu et accusé – à tort ou à raison, on ne le saura jamais vraiment. Pourtant et cela est réel, c’est en grande partie grâce à Bobby Fischer que les conditions des joueurs d’échecs sont telles qu’elles sont aujourd’hui et bien que l’image d’une foule en délire soit un bon moyen de juger de sa célébrité, les raisons de son sacrement en tant que « plus grand joueur de tous les temps » sont réelles.

On ne peut aborder ce film sans parler des trois – tristes – rôles féminins : Une mère, à la limite de la prostitution, insultée par son fils dès le plus jeune âge; une soeur à l’écoute et inquiète mais qui, jamais, ne passera à l’acte et une prostituée. Malgré le contexte de domination masculine de ce milieu et de cette époque, la vision de ces femmes est plus que limite bien que que le film ne soit dans une volonté de rester fidèle aux faits ou qu’il n’adopte réellement et concrètement le point de vue du personnage principal, arguments derrière lesquels il pourrait se dérober à la critique.

La traduction littérale du titre original, « le sacrifice du pion » en rapport à une stratégie qui consiste à sacrifier un pion pour acquérir un avantage sur l’adversaire, amène une dimension plus profonde au récit mais qui, là encore, reste en marge de la structure du biopic. Car finalement, et ce malgré les 114 minutes, Le Prodige ne fait que survoler toutes les thématiques que cette histoire a à aborder : guerre froide, maladies mentales liées à un tel conflit ou/et à une ascension sociale aussi fulgurante et répercussion sur l’entourage du concerné, révolution d’une discipline sportive, … La liste est longue – ambitieuse – et le récit finit malheureusement par en pâtir.

A propos Audrey Lenchantin 56 Articles
Journaliste du Suricate Magazine

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