Kimchi Baguette : good old recipe

Scénario : Silki
Dessin : Silki
Éditeur : Dargaud
Sortie : 28 avril 2023
Genre : Roman graphique, Documentaire

Elle s’appelle Seulkee, Seulgi, Silki… Compliqué d’angliciser un prénom. De le rendre facilement prononçable pour les Européens. Mais ça, c’est un moindre mal quand on est une jeune femme coréenne et qu’on déménage en France. Il y a des problèmes bien plus grands que de savoir comment donner à quelques syllabes étrangères, une forme harmonieuse dans la bouche de Français mal dégrossis. Donc, à ce stade, vous l’aurez compris, ça va aborder des sujets qui fâchent. Nous mettre le nez dans notre merde, qui pue le stéréotype. Non, une femme qui vient d’Asie n’est pas une poupée mignonne, manufacturée pour être l’objet de fantasmes. Elle n’est pas jaune, avec les yeux bridés. Pas plus qu’elle n’est forcément chinoise.

Mais Kimchi Baguette n’est pas qu’un plaidoyer. C’est aussi une recette qui se veut légère. Avec humour Silky compare. Le sexe, l’administration, la cuisine, le système électoral … Et même la cigarette. Le saviez-vous, 97 % de l’espace public dans le centre de Séoul est non-fumeur. En Corée, on passe Noël avec ses amis et Nouvel An en famille. Le Kimchi est le nom donné aux légumes fermentés, assaisonnés d’épices et de produits de la mer.

Un projet au départ numérique

Dans un premier temps, le projet de Kimchi Baguette se cantonne à la sphère numérique. Les strips de Silky se déclinent en capsules qui se noient dans l’immensité d’instagram. Elle se lance avec Mâtin, la revue digitale de Dargaud qui publie sur la plateforme, tous les jours à 07:07, des séquences de dix cases, se définissant souvent comme drôles et engagées. Bref, Dargaud surfe sur la vague. L’avantage de ce format pour les artistes, c’est qu’il constitue un tremplin. Mâtin édite ensuite des compilations de certains de ses auteurs et autrices. Et c’est comme ça que Kimchi Baguette s’est exporté (certains diront expatrié) au format papier.

Les préjugés concernant la population asiatique existent, même si c’est une forme de racisme dont on entend moins parler. Et la bande dessinée n’est pas un modèle de vertu en la matière. Kimchi Baguette permet à la fois de découvrir une culture, tout en informant les lecteurs des comportements blessants (même s’ils sont parfois bien intentionnés ou juste le fruit de l’ignorance) qu’il ne faut pas reproduire. Qu’il existe un espace pour une telle littérature est primordial. Mais en l’état, Kimchi Baguette manque encore un peu d’épice. Dans un monde où la bande dessinée converge de plus en plus avec les réseaux, ce genre de contenu – politisé mais accessible – fait légion. Alors on regrette que Kimchi Baguette n’ait pas réussi à proposer quelque chose qui sorte réellement du lot. Une surprise graphique, un peu plus d’humour, des informations qui pourraient interpeller même les publics avertis, parce que c’est majoritairement celui qui achètera son livre.