Intra muros : un plongeons entre les vagues des souvenirs

De Alexis Michalik. Mise en scène de Julien Poncet. Avec Edwige Baily, Itsik Elbaz, Marwane El Boubsi, Julia Le Faou et Fabrice Rodriguez. Du 5 octobre au 14 novembre 2020 au Théâtre Le Public. Crédit photo : Gaël Maleux

Bien souvent, nous évoluons dans un monde qui n’appartient qu’à nous, sans trop nous soucier de la façon dont les autres personnages vivent les scènes que nous partageons avec eux. Quelquefois, nous essayons de nous mettre à la place des autres, sans jamais vraiment réussir à pénétrer leurs pensées profondes. Dans Intra muros, Alexis Michalik relève le défi. Après Le porteur d’histoire et Edmond, il nous entraine au cœur du milieu carcéral, au cœur du vécu de ses personnages, et mieux encore, par ce biais, il nous amène au cœur de l’histoire d’un homme.

Sur scène, un espace central démarqué nous évoque une scène, et toute l’action s’y jouera d’ailleurs. Au fond, devant un mur qui éveille sans conteste notre imaginaire des dispositions carcérales, un lit, une table et quelques chaises. Sur les côtés, des portants où pendent des vêtements nous questionnent déjà sur la direction que prendront les évènements. Nous nous demandons si les acteurs seront amenés à jouer différents personnages, et la suite nous donnera raison. Les acteurs arrivent sur scène et la pièce commence. Si le quatrième mur semble être brisé dès les premières minutes, c’est pourtant pour bien vite se redresser devant nous, comme pour nous préparer à ce qui nous attend. En effet, ce commencement semble nous rappeler que du présent, nous plongeons dans l’imaginaire. Puis, au sein même de cet imaginaire, dans un rythme soutenu agrémenté de jeux de lumières et d’interventions sonores qui ne permettent pas l’ennui, Michalik nous fait plonger à nouveau, encore et encore, jusqu’à nous perdre dans les pensées des personnages, dans leurs vies, dans leurs réalités.

L’histoire débute sur Richard, metteur en scène à l’enthousiasme débordant, qui s’apprête à donner son premier cours de théâtre à des détenus de la Centrale. Accompagné de son ex-femme et d’une jeune assistante sociale, il débarque naïvement – du moins nous semble-t-il – devant Kévin et Ange, les deux seuls participants de son cours. De fil en aiguille et de souvenir en souvenir, entre les scènes jouées par les personnages et les scènes jouées par les acteurs, nous apprenons que l’un des personnages n’est pas réellement ce qu’il laisse paraître, qu’un autre possède un passé bien trouble, mais pas dans le sens auquel nous pourrions songer, ou encore qu’un autre semble finalement plus acteur que suiveur. Avec brio, les acteurs se glissent dans les habits de leurs personnages, jouant à la fois le passé et le présent. La mise en scène est fluide et permet de donner au rythme des enchainements toute la profondeur nécessaire, tout en demeurant simple aux yeux des spectateurs. Et si la pièce débute sur une intrigue qui pourrait sembler simpliste, elle se termine dans une configuration aussi surprenante qu’imprévisible.

Le défi de nous entraîner avec lui dans l’imaginaire de ses personnages, Alexis Michalik l’a réussi. Tant le texte que les acteurs et la mise en scène nous séduisent. Entre l’histoire passionnante des personnages et l’ingéniosité de son déroulement, cette pièce semble s’inscrire du côté de la réussite. A vos agendas, c’est à ne pas rater !