Grand Bassin d’Elodie Llorca

auteur : Elodie Llorca
édition : Rivages
sortie : mai 2018
genre : roman

Pourquoi Per semble-t-il si mal adapté à la vie en société ? Jeune homme très solitaire et incapable de garder un emploi, il vit toujours avec sa mère dans la région du Norrland, en Suède. Cette dernière décide de le confier aux bons soins de l’un de ses amis, Ivar, qui travaille comme maître-nageur dans une piscine. Le jeune homme débute alors comme agent d’entretien avant de gravir les échelons et de se lancer également dans la formation de maître-nageur. Au fil du temps, les deux hommes s’apprivoisent. Malheureusement, Ivar meurt soudainement et c’est avec amertume que Per voit partir la seule personne susceptible de répondre aux nombreuses questions qu’il se pose sur ses parents : Sven, son père disparu en mer, dont il ignore s’il est mort ou pas, et Ronja, sa mère qui refuse de lever le voile sur certaines choses notamment sur la nature de sa relation avec Ivar. Per doit alors se raccrocher à des souvenirs épars de son enfance et tenter de reconstituer le puzzle de sa vie pour pouvoir avancer…

Le quatrième de couverture nous promet un « vertigineux jeu de piste psychologique ». Ce n’est pas exactement en ces termes qu’il faudrait évoquer le dernier livre d’Elodie Llorca. Grand bassin est un récit sans grands éclats ni retournements de situation. C’est avant tout un roman à l’ambiance toute particulière. Et c’est son point fort. Ici peu de dialogues et d’action, si ce n’est les maladroits mouvements de brasse des apprentis nageurs.  Si vous cherchez ce vertigineux jeu de piste promis ci-dessus, dirigez-vous plutôt vers le dernier Jean-Christophe Grangé. Par contre si vous aimez l’atmosphère qui se dégage d’une œuvre impressionniste, calme et un peu floue, ce livre est fait pour vous.

La relation père-fils est évoquée elle aussi tout en pudeur. On en aperçoit les contours par petites touches, d’après les souvenirs de Per. Ayant trop peu connu son père, il sera toujours en quête d’une figure paternelle. La relation qu’il noue avec Ivar n’est d’ailleurs pas innocente.  Un père absent laisse toujours des traces. Et certains s’en sortent mieux que d’autres.

Per est le narrateur. Homme à l’allure détachée de tout et de tous, c’est à travers ses pensées que lecteur suit l’évolution de l’histoire. Il a souvent laissé son existence prendre le cours que d’autres ont décidé pour lui. Son premier grand saut dans la vie, tout seul comme un grand, sera sa décision de devenir maître-nageur. Cet intérêt est sans doute induit par son amour du milieu aquatique, par ce bassin qui, une fois délesté des nageurs, retrouve son calme et sa majesté. Incapable d’aimer une femme, il reporte cette affection sur la piscine. On est d’accord, Per en tient une petite couche. D’autant plus qu’il développe la manie singulière de ramasser les objets perdus dans et autour du bassin pour s’en faire une collection. Sans oublier que la seule personne avec qui il souhaiterait se lier d’amitié est une fillette. Alors, gros psychopathe ou victime de solitude aigüe ?

Et c’est là que ça coince. Car malgré un décor empreint de quiétude et l’approche de bons sujets, il est très difficile de s’attacher à Per, homme mou et indifférent aux autres. On a du mal à le comprendre et on arrive difficilement à éprouver de l’empathie à son égard, ce qui compromet la lecture.  A noter aussi qu’il aurait été tellement plus agréable d’avoir davantage de passion et de coups de sang dans cette histoire! Il est assez laborieux de poursuivre sa lecture sans ressentir par moments ce sentiment si désagréable qu’est l’ennui.

A vous de voir si vous allez faire un plongeon dans ce Grand Bassin