En toute conscience, le quotidien des militants pour l’euthanasie

Couverture de la BD En toute conscience (Delcourt, 2021)

Scénario : Olivier Peyon
Dessin : 14
Éditeur : Delcourt
Sortie : 7 avril 2021
Genre : Roman graphique, Société

En toute conscience est un roman graphique qui évoque le quotidien d’un groupe de bénévoles pro-euthanasie dans le sud de la France. Une façon très concrète d’aborder le débat sur la fin de vie, sans idéalisme mais avec une bonne dose d’humour, de colère, de tristesse et d’empathie.

Un pari risqué

Ni la couverture, peu engageante, ni le sujet abordé, ne font présager un bon moment de lecture. Le suicide assisté est un sujet clivant encore très sensible. Sa pratique est illégale en France, comme le souligne l’album. Pourtant, En toute conscience réussit à aborder la question de l’euthanasie de manière très humaine et intelligente, sans idéaliser les militants et leur cause. Philippe, Françoise, Christine et Nicole sont êtres avec leurs qualités et (surtout) leurs défauts. Chacun, pour une raison qui lui est propre, souhaite défendre le droit à l’euthanasie. Pour mettre fin à la souffrance. Pour rester digne et protéger ses proches d’une lente agonie. Ou tout simplement pour rendre la mort moins terrifiante.

Des émotions complexes et subtiles

Les premières pages, très fortes, mettent en scène un suicide assisté au sein d’une famille, plongeant le lecteur directement au cœur du sujet. Les dessins comme les dialogues jonglent avec une multitude de sentiments : ceux des « accompagnants » comme ceux des personnes désirant mourir. Cette multiplicité des points de vue, très intéressante, est soulignée par les effets de cadrage de Livio Bernardo qui passe de vues aériennes ou en contre-plongée à des gros plans serrés sur les visages pour mieux souligner les émotions.

Chacun face à ses choix

En suivant les activités quotidiennes des bénévoles, de l’assemblée générale de l’association à l’accompagnement individuel de personnes en fin de vie, le lecteur découvre le sujet de manière très concrète, sans grand discours théoriques ni considérations morales. Il s’attache à ces destins individuels et se questionne sur ses propres valeurs, ses limites. La loi est-elle injuste ? Ou est-elle nécessaire pour protéger les personnes vulnérables et leurs proches ?

À travers le personnage de Vincent, un jeune homme de vingt-cinq ans qui souhaite mettre fin à ses jours après une rupture amoureuse, En toute conscience pose la question des limites. Quel degré de souffrance donne le droit d’abréger la vie ? L’âge joue-t-il un rôle ? Dans quels cas a-t-on le devoir d’aider, ou au contraire de refuser de l’aide à un candidat au suicide ? Et surtout : comment redonner à quelqu’un le goût de vivre ?

Un récit touchant et confrontant qui, malgré sa bichromie en noir et blanc, est bien moins sombre qu’il n’y paraît.

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