« A Rainy Day in New York » : la pluie tombe et Woody s’embrase

A Rainy Day in New York
de Woody Allen
Comédie romantique
Avec Elle Fanning, Jude Law, Timothée Chalamet
Sorti le 18 septembre 2019

Sa notoriété n’est plus à prouver, pas plus que celle des acteurs qu’il a sélectionnés – puisque se partagent l’affiche le très en vogue Timothée Chalamet, Elle fanning, Selena Gomez et Jude Law. Pourtant, Woody Allen a bien failli rester sur le carreau avec A Rainy Day in New York. Accusé d’abus sexuel sur sa belle-fille, mineure à l’époque, le cinéaste américain traîne une réputation scandaleuse à laquelle personne ne veut plus être associé. C’est Amazon qui ouvre la danse – le géant se retire de l’aventure et, ce faisant, laisse le film sans distributeur. Il est suivi des acteurs qui, le tournage achevé, commencent aussi à se désolidariser. Et même si l’octogénaire n’a pas tout  perdu de son génie d’antan, ce tapage n’annoncerait-il pas le début de la fin ?

Quarante ans après Manhattan, nous sommes de retour à New York. Ashleigh y est envoyée par la gazette de son école pour rédiger l’interview d’un réalisateur connu. Alors Gatsby, son petit ami, profite de cette opportunité pour organiser à sa belle un week-end inoubliable dans la grosse pomme. Mais l’interview se prolonge quand le réalisateur névrosé annonce à la jeune fille que, insatisfait de son travail, il compte tout laisser tomber. Elle se retrouve à jouer la muse émotionnelle, spirituelle et physique des désœuvrés du cinéma, pendant que Gatsby erre l’âme en peine dans les rues de New York.

Comme c’est souvent le cas dans les films de Woody Allen, New York n’est plus simplement le lieu de l’intrigue mais devient presque un personnage en soi. Le réalisateur filme la ville telle qu’il la perçoit : habitée d’une apaisante frénésie, elle est l’angoissante qui calme les angoissés. Sauf que cette fois, nous sommes loin des petits appartements d’artistes, on déambule dans le New York du Met, des soirées mondaines, du Carlyle et du Plaza. Et puisque Allen parle de l’élite vieillotte et traditionnelle, il en profite pour faire un bond dans le temps en s’inspirant de la ville de Fitzgerald, bercée par des airs de jazz. Il y a un gros travail sur l’ambiance qui fait toute la force du film, une force anachronique qui rend au New York du présent son charme du passé.

Et ce jeu sur l’ambivalence des époques est d’autant plus pertinent que la temporalité occupe une place importante dans le film. L’histoire, somme toute anecdotique et qui se déroule sur une très courte période, parle pourtant du passage du temps et du mouvement des choses que l’on croit parfois figées, comme l’amour, le travail ou le talent. Dans A Rainy Day in New York, il pleut à verse pendant que le monde bouge. Et puisque sous la pluie les amoureux s’embrassent, Woody Allen nous propose une comédie romantique parfois un brin décousue, souvent agitée, dans laquelle les acteurs paraissent surjouer les clichés qu’ils transportent. Et il saupoudre le tout d’une bonne dose de références jetées à la volée et de l’humour un peu particulier qui est le sien. Alors il est vrai que certaines scènes dans lesquelles Ashleigh séduit un homme plus mûr auraient pu être évitées mais, le passé scabreux du réalisateur mis à part, A Rainy Day in New York est assez réussi dans ce qu’il propose et mérite d’être diffusé à l’écran.