« The Batman », l’intégrale de la série

The Batman
de Duane Capizzi et Michael Goguen
Animation
Sorti le 2 mars 2022 en Blu-Ray

En parallèle à la récente sortie du film de Matt Reeves, Warner Bros. a choisi de rééditer l’intégrale des cinq saisons de la série animée The Batman diffusée entrée 2004 et 2008. 

Cette production donnant à voir un Chevalier Noir âgé de seulement vingt-six ans et combattant le crime à Gotham depuis peu de temps fait ainsi écho au nouveau film mettant en scène Robert Pattinson. Cette sortie sera l’occasion de (re)découvrir une série qui semble quelque peu oubliée, probablement éclipsée par l’aura de l’excellente Batman : The Animated Series (1992-1995) !

D’entrée, The Batman souffrira de la comparaison avec son prédécesseur, tant en terme d’animation que du point de vue de la profondeur scénaristique. Plus orientée sur l’action et destinée à un public très large, cette série empruntait à l’époque beaucoup à l’esthétique du mythique dessin animé Jackie Chan Adventures (2000-2005). Loin de la noirceur et de la profondeur de l’univers de Bruce Timm, cette nouvelle création tentait de modeler un nouveau microcosme à la chauve-souris de Gotham.

Ainsi, Batman se verra ici moderniser tandis que différents antagonistes seront réimaginés ou tout simplement introduits auprès du grand public. On découvrira ainsi des personnages jusque-là peu ou pas utilisés comme Ragdoll ou Spellbinder, tandis que d’autres seront adaptés à cette nouvelle mythologie. Clayface deviendra ainsi un policier piégé par le Joker, partagé entre son envie de vengeance et son devoir moral d’agent des Forces de l’Ordre.

De façon intéressante, l’esthétique du Joker de cette série renverra quant à elle à celle utilisée récemment dans le formidable Zack Snyder’s Justice League !

Cependant, dans cette optique, d’autres personnages seront présentés de façon bien moins complexe qu’auparavant : de scientifique cherchant à sauver son épouse, Mr Freeze deviendra un vulgaire voleur ayant eu un accident. Poison Ivy sera quant à elle réimaginée en étudiante écolo arrosée par des déchets toxiques et Man Bat en scientifique fou désireux de terroriser ses semblables.

Ainsi, la complexité de plusieurs antagonistes sera ici remisée au placard pour donner lieu à un divertissement pur et dur. L’animation soignée mais parfois cartoonesque et le rythme accéléré des épisodes renforceront ce phénomène, montrant que la production s’adresse à un public large et très jeune, et que l’idée est avant tout de divertir.

Ce parti pris aura visiblement peu réussi à la série lors de sa première diffusion car le ton changera doucement à partir de la saison 3, lorsque les inspecteurs Ellen Yin et Ethan Bennett seront doucement mis de côté pour céder la place au célèbre commissaire Gordon jusque-là absent. Au même moment, le générique composé par The Edge – guitariste de U2 – sera abandonné pour un nouveau thème musical composé par Andy Sturmer et plus proche de ce que l’on pourrait attendre d’une générique Batman.

C’est à partir de la fin de la saison 2 et du début de saison 3 que The Batman trouvera réellement son rythme tout en gagnant alors en qualité. L’arrivée de James Gordon et de Batgirl donneront corps à un univers plus familier et cohérent, ce qui laissera plus de loisir aux scénaristes pour développer calmement les intrigues – là où les deux premières saisons avançaient à cent à l’heure.

Dès la quatrième saison, la qualité sera alors exponentielle, chaque épisode étant meilleur que le précédent, tandis que les antagonistes se verront doucement complexifier. Le Sphinx/Homme Mystère, par exemple, se verra alors doter d’une Origin Story particulièrement touchante et plus complexe que ce à quoi l’on aurait pu s’attendre (Épisode 45 - La Revanche du Sphinx). De même, Harley Quinn sera à son tour réintroduite dans un épisode écrit par Paul Dini lui-même, qui réimaginera alors son héroïne à l’aube du vingt-et-unième siècle (Épisode 47 - Les deux font la paire) !

Ainsi, The Batman est une série qui n’aura pas hésité à prendre des risques dans ses deux premières saisons en utilisant des personnages moins familiers du grand public et en cherchant à offrir autre chose que Batman : The Animated Series diffusé quelques années plus tôt !

À l’aube de la saison 3, celle-ci en reviendra à certains fondamentaux en introduisant le commissaire Gordon, Batgirl et en offrant des intrigues plus homogènes. La saison 4 introduira quant à elle le personnage de Robin et offrira des épisodes réellement originaux (comme l’épisode 44, intitulé « Le Fléau », pour ne citer qu’un seul exemple). La saison la plus ambitieuse et probablement aussi la plus mémorable de la série !

Quant à la saison 5, elle amènera doucement certains membres de la Ligue des Justiciers à lutter aux côtés du Chevalier Noir.

The Batman est ainsi une série qui avance crescendo, cherche à se démarquer d’autres productions consacrées au héros masqué et n’hésite pas à se remettre en question. Une série qui aura souffert de la comparaison avec l’inégalable Batman : The Animated Series mais qui mérite réellement d’être redécouverte tant elle aura cherché à redéfinir son héros, ses intrigues, son style et à offrir un univers différent de ce qu’on pouvait connaître jusqu’alors.

Niveau Blu-Ray par contre, pas grand-chose à se mettre sous la dent. Les bonus sont rares (on regrettera notamment l’absence du long-métrage Batman contre Dracula, produit après la saison 2), les menus rudimentaires et les saisons présentées sans titre ni distinction, ce qui facilitera peu le passage d’un épisode à l’autre. Reste une série solide qui mérite le détour !