Rams : la claque silencieuse

rams poster

Rams

de Grímur Hákonarson

Drame, Comédie

Avec Sigurður Sigurjónsson, Theodór Júlíusson, Charlotte Bøving

Sorti le 9 décembre 2015

Grand gagnant de la catégorie Un certain regard au festival de Cannes, Rams a également remporté le Chistera du meilleur réalisateur au festival international des jeunes réalisateurs de Saint-Jean-de-Luz. Il s’agit seulement du deuxième long métrage du réalisateur islandais Grímur Hákonarson et on a du mal à y croire, tant la production fait état d’une réelle virtuosité visuelle, sonore et narrative.

Les parents de Grímur Hákonarson ont grandi à la campagne et lui-même y a passé un certain nombre d’étés dans sa jeunesse. Mais Rams n’est pas seulement le résultat d’un souvenir nostalgique puisqu’il est également le fruit de trois ans de travail sur le scénario, en aval de nombreuses recherches et discussions avec les fermiers de cette Islande rurale.

Le regard que porte le cinéaste sur ces éleveurs relève presque de l’admiration et celui sur les deux protagonistes principaux, les frères Gummi et Kiddi d’une grande tendresse, au minimum égale à celle que ces deux derniers portent à leur bétail.

Car c’est de cela qu’il s’agit dans Rams. Le drame familial auquel nous fait prendre part la narration n’a pas de prédominance sur le milieu social dont est tirée la péripétie. Bien au contraire, l’un et l’autre se soutiennent pour faire avancer l’histoire puisque ce n’est qu’à cause ou grâce à l’épidémie qui nécessitera l’abattage de l’élevage de toute une vallée, que les deux frères, fâchés depuis plus de quarante ans, devront avancer main dans la main afin de sauver leur héritage.

Perdu dans l’univers propre de l’ile de feu et de glace, le récit se démunit de toute larmoyance : des paysages blancs à perte de vue, dont on entend perpétuellement le craquement de la glace, amène une charge de pénibilité supplémentaire à ces vies dans lesquelles le récit nous immerge et fait en même temps écho à la distance, instaurée et certainement entretenue, des membres de cette « communauté ». Aucun sentiment léger, pas même lors d’un repas de Noël solitaire et aucune gène à dévoiler les corps nus enlacés de deux vieux frères.

Les dialogues, au même titre que les couleurs, sont utilisés avec une parcimonie telle, qu’on pourrait la croire, à tort, révélatrice d’une forme de timidité de la part du réalisateur. Et pourtant, à mille lieux de ce type de vie, le récit nous touche parce qu’il est d’une justesse et d’une finesse rare, sans faille.

A propos Audrey Lenchantin 56 Articles
Journaliste du Suricate Magazine

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