More

    POV : Tu es un tube, mais le chocolat belge t’arrache au néant

    Imagine : tu flottes dans le néant, un bébé-tube sans conscience, sans désir, juste là, passivement. Et puis, un carré de chocolat belge offert par ta grand-mère vient te réveiller les papilles… et accessoirement, te faire naître au monde.

    Bienvenue dans Amélie et la métaphysique des tubes (Little Amélie or the Character of Rain en anglais), film d’animation aussi doux qu’un mochi vanille, adaptation pleine de tendresse du roman culte de la romancière belge Amélie Nothomb.

    Chocolat belge et renaissance existentielle

    Amélie a deux ans et demi. Elle est la fille de diplomates belges installés au Japon. Elle ne parle pas, ne bouge presque pas, et se vit comme… Dieu. Non pas un dieu, mais le Dieu. L’univers entier ? C’est elle. Jusqu’à ce qu’un événement bouleverse tout : sa grand-mère belge lui fait goûter un carré de chocolat blanc ramené de Belgique. Et là, révélation : d’un seul coup, ce tube inerte devient Amélie. Le corps s’éveille, les sens explosent, le monde s’ouvre. Le plaisir comme acte de naissance. Dorénavant, Amélie l’annonce : « Le plaisir, c’était moi, et à chaque fois qu’il y aurait du plaisir, il y aurait moi ».

    Un film sensoriel vanille-fraise

    Visuellement, c’est un doudou pour les yeux : des couleurs pastel façon glace italienne, et des mouvements tout en douceur. Les décors lumineux, à la fois réalistes et magiques, nous emportent dans le point de vue d’Amélie, tantôt frustrée de son emprisonnement intérieur, tantôt émerveillée par le monde qui l’entoure. Le sound design est délicat et précis. La musique, elle, flotte comme un souvenir d’enfance un peu flou et sucré. On remarque notamment l’omniprésence de la petite radio familiale grésillante qu’on trimballe partout pour écouter les tubes japonais des années 60, même à la plage.

    Petite fille, grandes idées

    « À 3 ans, on remarque tout et on ne comprend rien ». Oui, mais Amélie, elle, capte déjà pas mal de trucs pour son âge. Et surtout, le film, lui, ne prend pas les enfants pour des petits êtres fragiles et incapables de réfléchir.

    Sous ses airs de conte acidulé, le film glisse des thèmes complexes : la mort, le deuil, le souvenir, l’héritage, l’identité et la guerre. Tout ça, vu à hauteur d’une petite fille qui observe le monde avec de très grands yeux.

    Il y a des conflits intérieurs très justes, abordés tout en finesse : Amélie se sent japonaise. Elle vit là, elle aime ce pays et s’y identifie. Mais elle est belge, étrangère, et elle devra un jour partir. C’est un déracinement annoncé, un exil intime.

    Autre tension : la vieille propriétaire japonaise reproche à Nishio-san, la nounou de la famille, de trop s’attacher à « l’ennemi » – comprendre : les Occidentaux. Derrière la tendresse, il y a aussi la mémoire de la guerre, qui flotte comme une ombre discrète. Un sujet d’ailleurs brillamment abordé lors d’une courte séquence culinaire avec la nounou, qui vient raconter tout ça à Amélie sans jamais forcer la main.

    Pour autant, le film ne s’alourdit jamais. Pas de violons tristes ni de grandes leçons. Juste des émotions à hauteur d’enfant, racontées avec beaucoup de tendresse, un humour discret, et cette capacité à dire des choses profondes sans les asséner.

    C’est quoi, ce film ? Un bijou d’animation tout public, tendre et furieusement intelligent, à mi-chemin entre une séance de psychanalyse à 3 ans et une dégustation de pralines. Le genre de douceur qui te donne envie de grandir… ou de redevenir tout petit.

    Derniers Articles

    Amélie et la métaphysique des tubesRéalisateur-trices : Mailys Vallade et Liane-Cho HanGenre : AnimationNationalité : FranceDate de sortie : 25 juin 2025 Imagine : tu flottes dans le néant, un bébé-tube sans conscience, sans désir, juste là, passivement. Et puis, un carré de chocolat belge...POV : Tu es un tube, mais le chocolat belge t’arrache au néant