« L’Origine du mal », quand passé et présent se répondent

Titre : L’Origine du mal
Auteur : José Carlos Somoza
Editions : Actes Sud
Date de parution : 6 octobre 2022
Genre : Roman

Si la période de la Guerre froide est une mine d’or abondamment exploitée par les auteurs de roman d’espionnage, L’Origine du mal n’en est pas moins original car il situe le début de son action à une époque antérieure à celle-ci d’une part et d’autre part, décrit les tensions entre responsables de l’intelligence espagnole en Afrique du nord, sujet moins traité que le traditionnel affrontement Est-Ouest. C’est donc avec un grand intérêt que nous nous sommes plongés dans l’intrigue du dernier roman paru aux éditions Actes Sud de José Carlos Somoza.

Afrique du Nord à la fin des années 1950 : l’Algérie est en ébullition, le Maroc a des velléités d’indépendance, les ambassades bruissent de manœuvres et d’intrigues. C’est dans ce cadre suranné que se déploie une histoire d’amitié et de trahison entre deux jeunes phalangistes dans le protectorat espagnol de Tétouan, au cœur du Rif occidental. Quelques 70 ans plus tard, un manuscrit surgit chez un libraire madrilène qui rétablit la vérité de l’histoire mais commence par cet impossible constat : Je suis mort. On m’a tué un jour de septembre 1957 d’une balle dans la tête.

Même si les protagonistes de l’histoire n’ont pas existé, on est loin du mythe de l’agent secret incarné par James Bond, les personnages décrits par l’auteur se rapprochent sans doute plus de la réalité que le personnage imaginé par Ian Flemming. Et c’est tant mieux. Car si le danger était présent, l’auteur ne met pas l’accent sur des scènes d’action extravagantes mais plutôt sur la tension qui résultait de la nécessité de mener une double vie ainsi que sur les intrigues entre grandes puissances à une époque où les cartes se rebattaient après la victoire des alliés lors de la Seconde Guerre mondiale. De plus, prendre le point de vue espagnol à une époque où celle-ci était ostracisée est également un des atouts du roman, permettant à l’auteur de nous montrer comment les gouvernements négociaient pour appartenir à tel ou tel bloc.

Et si la pirouette finale est intéressante, permettant à l’auteur de montrer que de nombreuses questions et inimités liées à la période franquiste sont encore présentes dans l’Espagne actuelle, certains de ses éléments sont peut être superflus. Néanmoins, malgré cette légère déception, L’Origine du mal n’en reste pas moins un excellent roman que l’on ne saurait que conseiller à tous les amateurs de roman d’espionnage et/ou de cette période particulière et tragique de l’histoire espagnole.