Les Braises
Réalisateur : Thomas Kruithof
Genre : Drame
Acteurs et actrices : Virginie Efira, Arieh Worthalter, Mama Prassinos
Nationalité : France
Date de sortie : 5 novembre 2025
Les Braises, le nouveau film de Thomas Kruithof, tente sincèrement — mais maladroitement — de rendre le souffle politique qu’a incarné le mouvement des Gilets Jaunes. Porté par Virginie Efira et Arieh Worthalter, le film déçoit : alors qu’on pouvait espérer un regard lucide et engagé sur un épisode si caricaturé médiatiquement, on se retrouve face à un drame social convenu, centré sur un amour qui s’étiole.
À l’aube de l’éveil politique du mouvement, Karine (Virginie Efira) est ouvrière en usine. Son mari Jimmy (Arieh Worthalter) lutte pour maintenir à flot sa petite entreprise de transport routier. Mariés depuis vingt ans, parents de deux adolescents, ils incarnent l’idéal vacillant d’une classe moyenne moribonde. Confrontée aux injustices de sa condition, Karine se politise au fil de la révolte des Gilets Jaunes, emportée par la solidarité et la colère. Jimmy, lui, reste à distance, incapable de comprendre l’élan d’activisme qui la traverse.
Faire sentir au cinéma la force et la complexité d’un mouvement social est un pari risqué. Thomas Kruithof choisit de se placer au plus près de ses personnages. En privilégiant une métaphore filée hasardeuse — celle du couple qui se délite en miroir d’une révolte collective déçue, cette opposition entre l’intime et le politique, au lieu d’enrichir le propos, finit par l’appauvrir.
Pourtant, le début du film qui montre froidement le quotidien éreintant des ouvrières nous met en conditions. Si Virginie Efira semble d’abord déplacée dans cet univers, elle parvient rapidement à nous le faire oublier et à laisser exister des seconds rôles filmés avec justesse, témoignant de la solidarité au cœur du mouvement. La mise en scène des premiers affrontements avec la police, des violences subies et de la montée de la colère, trouve par moments une puissance presque documentaire. On sent la bascule venir.
Mais Kruithof effleure à peine les questions fondamentales portées par le mouvement — démocratie directe, RIC, éducation populaire — ainsi que ses déchirures internes. En réduisant la complexité politique des Gilets Jaunes à un duel conjugal, le film retombe dans une opposition binaire : Karine contre Jimmy. En voulant injecter de l’émotion par le prisme d’un couple qui se déchire, Kruithof finit par atténuer la violence bien réelle de la répression et par manquer le sentiment de révolte persistant dont les braises, justement, brûlent encore.