Homo Sapienne : un cri du coeur aux Riches Claires

© Bartolomeo La Punzina

De Niviaq Korneliussen. Mise en scène de Natalie Yalon. Avec Dimitri Carême, Nedjma Dulout, Fanny Gelas-Mignon, Lisa Kaison, Louna Toussaint. Du 13 décembree au 31 décembre 2023 au Théâtre des Riches Claires.

Ils sont cinq sur scène, cinq jeunes à la dérive. Ils vont peu à peu se dévoiler, parler de leurs difficultés. Les monologues sont entrecoupés d’intermèdes musicaux. Les corps expriment l’angoisse. Pas de décor ni de costume pour ce spectacle qui oscille entre théâtre, danse et performance, cri d’alarme de la jeunesse millenium en faveur de plus d’authenticité. Quelque chose de sincère et touchant se dégage de cette prestation, quelque chose qui capte l’attention.

La pièce est basée sur le roman de Niviaq Korneliussen paru en 2014. Agée de 24 ans à ce moment-là, son écriture est celle d’une jeunesse désœuvrée, perdue dans un Groenland perturbé par le dérèglement climatique. Le spectacle est centré sur les émotions, les sensations. Pas de schéma narratif mais un cri, un cri effrayant, un plaidoyer pour l’acceptation des différences, une recherche d’amour.

Les acteurs (Dimitri Carême, Nedjma Dulout, Fanny Gelas-Mignon, Lisa Kaison, Louna Toussaint) se partagent la scène, chacun exprimant à sa façon son angoisse existentielle : « J’ai besoin de respirer… Je détruis tout ce que je touche … Je pourrais me suicider… La vie est absolument horrible ».

Dans leurs témoignages il est question d’homosexualité, de bisexualité ou de transsexualité. Mais aussi de solitude, d’inceste, de désespoir : « Mon cœur est tellement vide que ça en ferait pleurer les anges ». Si les monologues sont centrés sur la recherche d’acceptation des différences, les craintes d’ordre écologiques sont présentes en toile de fond. Le roman se déroule à Nuuk, la capitale d’un Groenland en proie à la fonte des glaces. « L’île de la colère… en manque d’oxygène ».

Sincérité, authenticité et émotions sont à l’ordre du jour dans cette expression commune d’une douleur ancrée. Musicalement, amour, sexe et désespoir sont au rendez-vous avec des morceaux aussi hétéroclites que Les moulins de mon cœur (Coline Rio), un remix de Rakata, Le diable dans la bouteille (Juliette), Habibi (Tamino), Jardin d’hiver (Henri Salvador) ou d’une version remasterisée  de la célèbre chanson tsigane Les yeux noirs. Un cri qui est un témoignage supplémentaire en faveur d’un changement, d’un renouveau, d’une société qui respecterait les singularités.