Dans « Je Playback », Laurence Bibot ausculte l’image de la femme dans les médias

© Thierry Denblinden

De et avec Laurence Bibot, le 10 mars à Central à la Louvière, les 13 et 14 avril à Wolubilis (Bruxelles), le 15 avril à La Sucrerie (Wavre), le 19 avril au Centre Culturel de Huy, le 27 avril à Maison de la Culture d’Arlon, le 09 mai au Waux Hall (Nivelles) et le 17 mai à l’Eden (Charleroi).

Sur une introduction musicale rythmée, le spectacle commence par des images « behind the screen » des accessoires – pas si accessoires que cela – qui permettent à l’artiste de façonner ses personnages. Perruques en série, ribambelle d’objets en tout genre, éventuellement détournés, lunettes vintages ou excentriques, foulards, costumes, faux micro, … et sa bobine.

Laurence Bibot arrive sur scène, très élégante dans une robe fuseaux, et explique le principe du playback, exemples à l’appui. Une femme s’exprime devant la caméra et la comédienne lui prête sa voix en direct ou la comédienne est filmée en prêtant son image à la voix d’une femme qui s’exprime dans un reportage.

Par ennui, ou par envie, Laurence Bibot s’est, en effet, plongée dans le très riche catalogue de la Sonuma, Société de numérisation et de commercialisation des archives audiovisuelles créée en 2009 et chargée de préserver, de numériser et de valoriser les archives audiovisuelles de la RTBF. Elle a puisé dans les images et le son de reportages, interviews, micro-trottoirs, la matière pour réaliser des capsules vidéos qu’elle a diffusé sur les réseaux sociaux avant de les rassembler dans une exposition au Musée de la Photographie de Charleroi. L’artiste pour qui se déguiser, seule, avec tout ce qui lui tombe sous la main, relève d’une seconde nature, a trouvé dans la combinaison de l’ennui et d’Instagram un nouveau terrain de jeu.

S’intéressant quasi exclusivement aux paroles et images de femmes, qui sont souvent des mères, et dont les (vrais) noms sont toujours mentionnés s’ils sont disponibles, elle redonne vie et lumière à des inconnues comme à des icônes de la culture comme Barbara, Françoise Sagan, Marguerite Duras (un peu vénère), Annie Girardot, Niki de Saint Phalle ou Amélie Nothomb. La shampouineuse, la caissière de supermarché, la présentatrice de télévision, la joueuse de football, la sans-profession, côtoient ainsi une mère de hippie, une mère de chômeur, une autre qui élève son enfant au milieu des animaux pour lui procurer un équilibre.

Constatant qu’il y a peu de jolies filles dans les archives belges, Laurence Bibot compare à la Belgique à un grand bêtisier et, au vu de certaines séquences épiques, on ne peut pas vraiment lui donner tort. Tout comme lorsqu’elle diagnostique que « la Belgique est la terre d’accueil de l’auto-foutage de gueule ».

Dans une scénographie très léchée – avec de belles images et un bon son -, la comédienne excelle, une fois de plus, dans le mimétisme avec les sujets qui se prêtent (involontairement).à l’exercice. Elle impressionne par sa faculté à reproduire la posture, les mimiques voire les tics de langage même si ce n’est pas sa voix qui les produit. Au-delà de cette excellente prestation baignée d’humour et de second degré, cette parodie des archétypes féminins constitue un véritable hommage aux femmes, à toutes les femmes, les anonymes comme celles qui ont donné du sens à sa vie.