Nos batailles, de batailler mon cœur ne s’arrêtera jamais

Nos batailles

de Guillaume Senez

Drame

Avec Romain Duris, Laure Calamy, Laetitia Dosch, Lucie Debay, Basile Grunberger

Sorti le 3 octobre 2018

Alors qu’Olivier a déjà fort à faire au sein de son entreprise à batailler avec le syndicat des ouvriers contre le patronat – lequel essaie de faire accepter des conditions de travail de plus en plus précaires –, voilà que sa femme Laura disparaît du domicile conjugal du jour au lendemain, le laissant seul avec leurs deux enfants, Elliot et Rose. Olivier aura donc deux batailles à mener de front : l’une dans la sphère professionnelle, l’autre dans la sphère privée.

Le second long métrage de Guillaume Senez ne fait en réalité que creuser ce qui travaillait déjà ses courts et son premier long (Keeper) : aborder une problématique en lien avec la gestion d’une famille « en crise », et cela en la mettant en parallèle avec la situation sociale dans laquelle se trouvent les membres de cette famille. En cela, le film et le travail de Senez dans sa globalité apparaissent, en quelque sorte, comme cohérents. Nos batailles n’en est pas moins problématique, dans son fond comme dans sa forme, par les raccourcis qu’il prend et surtout, fondamentalement, par sa prévisibilité et sa manière d’user les clichés jusqu’à la corde.

Le titre, Nos batailles, fait donc références aux deux « combats » que doit mener de front le personnage d’Olivier (Romain Duris). La mise en parallèle de ces deux « batailles », les raccourcis allégoriques et scénaristiques qui sont creusés entre les deux, confèrent déjà au film une lourdeur certaine, comme si un unique combat ne suffisait pas. Il fallait bien deux batailles à ce personnage seul au monde pour affirmer de manière indiscutable son statut de combattant.

Le fait qu’il soit interprété par Romain Duris ne fait qu’ajouter une couche au mille-feuille lourdingue, conférant – de plus – à ce personnage socialement crédible une stature de héros romanesque de cinéma. Duris n’a-t-il pas prouvé par le passé qu’il était l’incarnation parfaite de cette figure héroïque ordinaire, ce monsieur tout-le-monde a priori insignifiant mais grandi par son passif d’acteur populaire ?

Confortabilisé par la présence de cet acteur-caution et de quelques autres, tout aussi pratiques (Laure Calamy et Laetitia Dosch, en pleine « hype ») en termes de crédibilité intellectuelle, le film se contente mollement d’enfiler les perles et les scènes attendues : Olivier ouvrier contre les patrons, Olivier père tentant de réconforter ses enfants, Olivier frère en pleine séance de thérapie familiale avec sa sœur, sans compter l’inévitable scène de respiration musicale, etc. Nos batailles remplit paisiblement son petit programme pépère de film du milieu, jusqu’à une résolution qui n’en est évidemment pas une, restant conforme à son allure de chronique prémâchée. Le tout baigne donc dans un réalisme romancé, répond à des normes narratives et esthétiques évidentes, mais refuse d’en accepter les contraintes jusqu’au bout, de peur sans doute d’être taxé de « feel good movie » ou, pire encore, de téléfilm.