Rencontre avec Nawell Madani

Crédit photo d’illustration ©Wahib

Adulée en France, véritable star de la scène parisienne, la belle Nawell Madani revient dans sa Belgique natale le 3 mai prochain. L’occasion pour la jeune bruxelloise de renouer le lien si fort qui l’unit au plat pays, une filiation qui se ressent dans le titre de son spectacle intitulé C’est moi la plus belge !.

Un spectacle hilarant et énergique qui s’inscrira dans le cadre du festival Juste Pour Rire Brussels dans lequel elle tiendra ni plus ni moins que la tête d’affiche. Rencontre avec l’un des plus grands espoirs « made in Belgium ».

Nawell Madani, vous avez commencé votre carrière en tant que chorégraphe mais c’est vers l’humour que vous vous êtes finalement dirigée. Comment êtes-vous passée de la danse au stand-up ?

J’ai toujours voulu être comédienne mais l’accès à cette profession était assez difficile. Être danseuse, surtout dans la discipline dans laquelle je voulais me lancer, celle du hip hop et du new style, te permet de t’entrainer chez toi en poussant les tables et en essayant de reproduire les chorégraphies.

Dans la comédie, il faut un bon coach et une bonne école. Rien que l’idée de trouver une bonne école est compliquée.

Lorsque je suis arrivée à Paris, j’ai dansé pour beaucoup d’artistes puis un jour, lors d’un stage de danse, j’ai eu accès à un cours de dramaturgie. Le professeur m’a alors demandé depuis combien de temps je faisais de l’acting et je lui ai répondu que c’était la première fois. Il m’a alors dit de monter sur scène et de tenter ma chance. Au départ, je pensais qu’il se moquait de moi mais non.

Depuis, je suis montée sur scène et je n’en suis plus redescendue. Cela va faire deux ans que je joue tous les jours.

Vous avez fait partie du prestigieux Jamel Comedy Club. Est-ce qu’il vous a été difficile de trouver votre place au sein de cette équipe et de vous y imposer ?

Oui. Premièrement, rien que le fait de rentrer au Jamel Comedy Club est quelque chose de compliqué. Il y a énormément d’humoristes sur Paris qui rêveraient d’intégrer la troupe. Cela en fait un lieu très select. À l’époque, j’étais d’ailleurs la seule femme de la troupe.

Pour ma part, c’est le metteur en scène du Jamel Comedy Club qui m’a proposé de venir faire un essai. Trois jours après, j’intégrais la troupe. Mais intégrer ne veut pas dire y rester. Il faut faire ses preuves pour faire partie du noyau qui part en tournée et fait les premières parties de Jamel (Debbouze).

C’est une grosse pression car de nombreuses personnalités, comme Alain Chabbat, viennent régulièrement voir les shows et peuvent penser à vous pour un rôle ou l’autre au cinéma. De plus, plein de journalistes y passent. Vous devez donc être à 100 % chaque soir.

Ensuite, il y a aussi la difficulté de monter devant sept autres humoristes qui ont souvent plusieurs années de carrière derrière eux. Mais je me suis accrochée, j’ai joué partout à Paris, j’ai affuté mon art et, lorsque je me suis sentie prête, j’ai joué mon propre spectacle C’est moi la plus belge.

c est moi la plus belge affiche

Un titre qui sonne dès lors comme une revendication de vos origines belges…

Complètement. Quand je suis arrivée à Paris, j’ai tout de suite senti que mon humour était différent de celui des autres humoristes issus de l’immigration. Je n’avais pas de problème d’identité nationale, de banlieue ou de cité. Etant née à Watermael-Boitsfort, ayant grandi dans une résidence pavillonnaire à Anderlecht puis à Rhode-Saint-Genèse, je n’ai pas connu les problèmes d’identité qui sont les leurs.

J’ai donc assumé mon passé, je suis arrivée en disant « je viens de Belgique, j’ai une autre histoire à raconter ! ». Et puis, je trouve cela drôle d’avoir un nom maghrébin et de dire que je suis la plus belge.

Les Belges sont-ils à la mode à Paris ?

Bien sûr. Il y a une belgitude qui s’est installée à Paris. Être Belge en France est devenu un gage de garantie.

Le Belge a une réputation de travailleur tout en étant simple et cool. Puis, on doit travailler là-bas car il est très difficile de vivre de son art en Belgique. On est quasiment obligé de partir pour être connu puis revenir, ce qui est incroyable.

D’ailleurs, je commence seulement à être assez connue en Belgique alors que j’ai déjà beaucoup travaillé en France, même à la télévision sur Canal + ou TF1.

Dans les extraits que tout le monde peut voir sur internet, vous avez un esprit frondeur en défendant notamment la femme. Revendiquez-vous ce trait de caractère ?

Lorsque je suis rentrée au Jamel Comedy Club, je me suis retrouvée face à des hommes dans un milieu relativement machiste. De ce fait, j’ai dû redoubler d’efforts pour trouver ma place. C’est donc plus une réaction.

Mais il est vrai que c’est l’histoire d’une jeune femme urbaine qui vit avec son temps, sans pour autant être cataloguée comme française, belge ou magrébine.

Ce n’est donc pas un humour sectaire ?

Pas du tout, j’essaie que tout le monde se retrouve dans mon personnage. Je ne suis pas communautariste.

De plus, j’essaie de parler autant aux hommes qu’aux femmes. Je pense que les hommes s’y retrouvent aussi. J’ai d’ailleurs un côté garçon manqué qui est en moi.

Une dualité homme – femme que l’on peut retrouver dans C’est moi la plus Belge ?

Bien sûr. Tout le monde mange, les hommes comme les femmes. Moi, en premier.

C’est Ali Bougheraba, peu connu chez nous, qui met en scène votre spectacle. Pourquoi avez-vous décidé de travailler avec lui ?

Je cherchais un metteur en scène pour que l’on m’apporte un regard extérieur. C’était utile car, avec mon spectacle, je sortais du stand up pour aller vers un travail plus théâtral. Dans celui-ci, je passe du rire aux larmes, ce qui est un travail de comédien avant tout.

J’ai vu Ali Bougheraba au Festival d’Avignon, il y présentait son spectacle L’odyssée de la Moustache. Je suis littéralement tombée amoureuse de son spectacle. Après sa représentation, je suis allée vers lui et je lui ai dit que je voulais travailler avec lui.

Au départ, il était hésitant mais on a tout de même tenté le pari et, au final, on peut dire qu’il est réussi. Ce spectacle est un succès. Les salles affichent complet.

D’ailleurs, nous travaillons sur l’écriture d’une pièce de théâtre actuellement.

Allons-nous vous voir au cinéma prochainement ?

Oui. J’ai pas mal de propositions qui arrivent mais je prends le temps de faire le bon choix. Car, lorsque l’on est comédien, on a tendance à se ruer sur n’importe quoi avec engouement. Cela peut conduire à des mauvais choix qui tuent votre carrière.

Je me fais conseiller par mon agent pour choisir ce qui me conviendra le mieux. Mais il est vrai qu’aujourd’hui j’ai le luxe de pouvoir prendre mon temps et de choisir ce que je veux. À l’époque, lorsque je recevais un scénario, je le lisais quatre ou cinq fois mais je n’ai plus le temps de faire cela.

Def Jam a même créé un label pour vous…

Tout à fait. En fait, Def Jam est une entité aux Etats-Unis. Ce sont eux qui ont produit des chanteuses comme Rihanna et des humoristes comme Chris Rock ou Dave Chappelle. Depuis quelques temps, il existe également Def Jam France où on peut trouver des artistes comme Vitaa ou Disiz la Peste.

Le producteur de Def Jam France est venu me voir jouer. À la fin du spectacle, il vient vers moi et me dit : « Je vais te produire ! ». J’avais d’autres propositions, j’ai donc fait jouer la concurrence. Au final, je voulais surtout avoir un contrat où le producteur allait m’accompagner dans ma carrière, quelqu’un qui croit en moi. Et je voulais aussi un producteur qui puisse mettre les moyens nécessaires.

Def Jam a proposé d’ouvrir un nouveau département pour moi, Def Jam Comedy. Au départ, je pensais qu’ils blaguaient mais quatre mois plus tard, j’avais un département créé rien que pour moi avec des gens qui ne travaillaient que sur mon projet. C’est formidable.

De plus, cela me permet de côtoyer des stars comme Mylène Farmer, Drake ou Stromae, car Def Jam fait partie d’Universal.

Réservez vos places pour C’est moi la plus belge le 3 mai 2014 au Cirque Royal en cliquant ici.

Propos recueillis par Matthieu Matthys

A propos Matthieu Matthys 919 Articles
Directeur de publication - responsable cinéma et littérature du Suricate Magazine.

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