Pans d’une œuvre à la poésie scabreuse au Château de Thozée 

Video II H

En janvier 2022 le château de Thozée est reconnu Opérateur d’appui du Musée Félicien Rops et utilise ses archives pour alimenter la pratique d’artistes contemporains ; Hommage à Pan est la première pierre de cette collaboration. L’artiste Peter Depelchin, originaire d’Ostende, nous initie à l’imagerie stratifiée qui tisse sa réflexion artistique en liant sa passion pour l’Histoire de la Grecque Antique et ses recherches actuelles. Directement affiliée à l’œuvre du graveur namurois Félicien Rops (1833-1898), un arrimage se tisse entre XIXè et époque contemporaine. La nimbe de cet édifice peut donc agrémenter des pratiques dites archaïques d’une vision érudite et novatrice.

 

Portrait photographique de Peter Depelchin

Mythes

Dans un espace mythique, où récit antique et langueur bucolique se mêlent, les divinités prennent vie et se situent au-delà d’une frise chronologique créant leur propre fresque en harmonie avec l’architecture alambiquée :  le dieu Pan et ses acolytes, tels que Virgile ou Pétrone, y célèbrent le plaisir et la joie, leur esprit fougueux nous contagie à travers quatre Chambres qui accueillent les réflexions artistiques de Peter Depelchin dont la dextérité multidirectionnelle est traduite par l’usage de différents médiums. L’hybridité que l’on retrouve volontiers chez Orphée, où les métamorphoses donnent lieu à des bals singuliers, est transposée dans une scénographie romanesque. Le visiteur est transporté dans une temporalité à la fois abstraite et historique. 

AFFICHE Hommage à Pan

Rituels

Les rites païens rendent à la pierre et à la température froide une chaleur charnelle ; la rapidité invoquée dans la composition en croquis qui accompagne les oeuvres produites est semblable à celle avec laquelle on compose des modèles nus, exercice que l’artiste a pu pratiquer en école d’art. Les dix-Têtes en céramique, Les Masques de Pan, expriment l’urgence d’une communion entre parade et sensualité, un continuum en torsion qui dialogue avec Giandomenico Tiepolo avec ses Têtes de Satyres et autres Grotesques ou avec Masque Parisiens de Rops. Les photographies de Pierre Liebaert viennent souligner l’inter influence entre passé et présent non pas par un lien didactique tangible mais par une fusion où le concept de masque est ritualisé. Cette fusion est aussi celle des cultes qui imprègnent la matière d’un dynamisme organique et subtilise la chaire. La sérialité devient mobile, on l’observe avec Constellation de Pan chambre III où les cornes de vaches forment une danse scabreuse.

Masque satirique 10, dessin a Peter Depelchin

Chorégraphie

Une mise en scène saisissante où l’envergure du lieu s’illumine sous l’égide d’une orgie délicate. Des personnages contemporains sont invités à jouer dans un cadre baroque avec la vidéo Visite de Pan dans la Chambre verte. Ce théâtre des corps métamorphosent tous les organes – dont les génitaux – en instruments pour transmettre une euphorie esthétique. La tradition de tableau vivant s’inscrit dans le sillage de Fellini ou Pasolini qui constituent des fables aux tourments esthétiques. La matière musicale vient ajouter un trait incantatoire à la jubilation cinématographique. Céramique expressive, image virtuels encadrées et reflets astraux énigmatiques édifient une totalité naturelle peuplée de créature en émulsion. Le syncrétisme scénaristique nous immerge dans un monde au leitmotiv onirique qui se précise pièces après pièce.  

Allant à l’encontre de la fable L’homme et le Satyre d’Ésope, nous sommes incités à identifier différents axes de symbolisations.  En quittant son état initial de pan-ique, la divinité extrait à l’aura du château une ambiguïté que nous devons transcender plutôt que fuir.