Parti en fumée : l’exploration de l’héritage paternel… et bien plus encore !

© Alexandre Drouet

Ecriture, jeu et conception d’Othmane Moumen. Du 15 au 19 novembre 2022 au Théâtre des Tanneurs.

Le comble d’un.e comédien.ne n’est-il pas d’incarner une voix et un corps sur scène ?

Si le talent de comédien d’Othmane Moumen n’est plus à prouver, il sort cette fois de sa zone de confort : il est à la fois metteur en scène, auteur, technicien, créateur… Il montre qu’il sait tout faire et qu’il arrive toujours à surprendre son public. Parti en fumée est un seul en scène poignant, une forme courte de son futur spectacle qui sera présenté en 2024.

Il y a 6 ans, le père d’Othmane apprend qu’il est atteint d’un cancer des poumons (ou plutôt d’un poumon), il subit deux opérations et sait que la seconde sera la dernière. Pourtant, 6 ans après, il est toujours là et continue à fumer, comme un pied-de-nez au cancer. Ce projet d’Othmane lui permet d’interroger son père, tel un journaliste afin de saisir toute la finesse et toutes les facettes de cet être qui fait partie de lui et de sa construction identitaire.

Othmane incarne son père d’une manière très singulière. Il incarne tant son corps (via l’utilisation d’une marionnette à échelle humaine et via le port d’un masque), que sa voix (via l’enregistrement de la voix de son père). Mais en aucun cas sa propre présence sur scène n’est cachée ou « masquée », elle est pleinement assumée. Ce choix permet à la fois d’assumer la connivence avec le public – en brisant ce fameux 4e mur avec la volonté d’accrocher le regard du public –, mais aussi de donner vie sur scène à son père sans s’oublier pour autant. Il s’agit d’un subtil mélange de générations, de canaux de communication (enregistrement, projection de texte, danses, musiques…).

Othmane ne prononce pas un mot, mais nous donne à voir tout un monde. Il ne « dit » rien, pourtant il dit tout de par sa présence sur scène. Nous entrons dans son intimité, il met ses tripes sur la table afin de rendre hommage à un homme pourtant toujours vivant. Ce choix de mise en scène nous permet de nous interroger sur la volonté de garder une trace tant de la voix que des traits d’une personne : montrer pour toujours se souvenir ?

Nous avons tout de suite un sentiment d’immédiateté, de proximité et de véracité rendu palpables par la scénographie et le choix de livrer un témoignage. Les interludes musicaux accentuent cette volonté de transparence et de rendre compte de la situation d’un immigré : il n’est nulle part chez lui.

Nous sommes certains que le public sera au rendez-vous en 2024 et nous vous conseillons donc de garder un œil sur cette future pépite en construction.