Léonard de Vinci, une biographie présentant l’homme mais surtout son oeuvre

titre : Léonard de Vinci, la biographie
auteur : Walter Isaacson
édition : Quanto
sortie : 7 mars 2019
genre : biographie

Walter Isaacson est bien connu dans le monde anglo-saxon pour, entre autres, ses biographies de Benjamin Franklin, Albert Einstein et Steve Jobs. Son nouvel ouvrage, la biographie de Léonard de Vinci, figurait même l’an dernier parmi les recommandations de lectures estivales de Bill Gates. Mais méfiez-vous, ce n’est pas parce que nous utilisons le système d’exploitation d’un des hommes les plus riches du monde que nous partageons ses goûts littéraires.

À l’instar d’Einstein, Léonard de Vinci est un personnage de la culture populaire auquel sont associées des images connues, comme son autoportrait (utilisé dans l’article dédié sur Wikipédia) représentant un vieil homme chauve à la longue barbe ; sa célèbre Joconde exposée au Louvre dont la taille est autant un motif de déception que le nombre de ses observateurs une source de découragement ; et La Cène, ce dernier repas agité de Jésus-Christ en format panoramique.

L’intérêt principal de l’ouvrage d’Isaacson est évidémment d’en apprendre plus sur ce génie italien né au 15ème siècle. Derrière le personnage prodigieux que nous ont rapporté les siècles, Isaacson nous présente un homme et une époque. Léonard de Vinci n’est pas né avec un pouvoir « divin » de connaissance et d’ingéniosité. C’était un individu dont la naissance illégitime lui a permis de se tourner vers les arts plutôt que d’emprunter la voie du notariat comme le voulait la tradition paternelle. C’était une personne sociable, observatrice, curieuse et travailleuse qui excellait notamment en musique, en peinture et en géométrie, mais qui peinait avec l’algèbre et le latin. C’était aussi un homosexuel assumé et un végétarien convaincu. Il évoluait dans une époque où les sciences et les arts n’étaient pas catégorisés en sciences dures et « molles », et où les œuvres étaient le fait d’échanges perpétuels et d’un travail collectif. Ce genre d’informations biographiques et historiques rendent son humanité à Léonard de Vinci et réconfortent le lecteur en soulignant le caractère tout relatif des codes de chaque époque. Pourtant, ces aspects qui font souvent la valeur des biographies sont au final peu présents dans le livre.

Dans certains ouvrages biographiques, la « reconstruction » des événements et de l’époque est aussi fluide que dans un roman, la figure historique étudiée devenant ainsi le héros ou l’héroïne de cette histoire vraie. Au contraire, « on ne s’oublie » à aucun moment dans la lecture de cette biographie de Léonard de Vinci. La présence de Walter Isaacson et son travail de recherche sont perceptibles à chaque instant.

L’ordre chronologique et thématique du livre ne résiste pas à « l’épreuve » de la lecture. Au fur et à mesure des pages, le lecteur est assailli de répétitions, de paraphrases et de détails. Rapidement s’installe la sensation qu’Isaacson aurait compensé un manque d’information sur son sujet datant d’une époque ancienne par une intense description de son travail. Or, l’explication de l’oeuvre de de Vinci finit par tourner en rond. Isaacson décrit par exemple en long et en large les peintures du maître, mais en s’appuyant à chaque fois sur les mêmes explications. À chaque analyse, il évoque le « sfumato » (la technique de l’atténuation des contours associée à la Renaissance), la perspective et l’étude de l’impact de la lumière sur les objets. Ces éléments sont évidemment très intéressants, mais mériteraient d’être expliqués plus en détail dans un livre dédié à l’art plutôt que d’être incessamment répétés dans un ouvrage biographique.

Ainsi, arriver au bout de cette biographie demande de la persévérance ou un intérêt bien spécifique pour Léonard de Vinci. La plupart des lecteurs constateront cependant que ce livre a le poids et la lisibilité d’une brique, n’en déplaise à Bill Gates.