La chute : Une bande dessinée au goût du jour

Scénario : Jared Muralt
Dessin : Jared Muralt
Éditeur :  Futuropolis
Sortie :  04 mars 2020
Genre : Anticipation

La civilisation humaine sombre petit à petit dans le chaos alors qu’une pandémie de grippe estivale a provoqué des pénuries d’eau et de nourriture, créant une crise politique et économique sans précédent. Dans ce climat d’angoisse, le quotidien de Liam et de ses deux enfants s’est transformé en une véritable épreuve de survie. Pourtant Liam n’a jamais entendu parler du covid19, et pour cause, il n’est que le personnage fictif d’une bande dessinée étrangement actuelle, La Chute,  sortie chez nous en mars 2020 aux éditions Futuropolis. Le moins que l’on puisse dire c’est que l’auteur bernois Jared Muralt a le sens du timing.

Une société qui se disloque

C’est en 2014 que germe dans l’esprit de celui-ci la base de ce récit dystopique, alors que déjà les crises environnementales et sanitaires sont évoquées comme autant de catastrophes qui menacent la civilisation à moyen terme. Mais ce scénario qui peu à peu se dessine n’est fondé que sur des hypothèses que s’amuse à imaginer le bédéiste et, même si parfois la fiction semble s’imprégner du réel, l’histoire de Liam reste très différente de la nôtre. Dans La Chute, les hommes négligés par les gouvernements, privés de nourriture, abandonnent toute forme de solidarité et sombrent dans une violence animale que fait naître leur instinct de survie. En réduisant l’organisation sociale à ce qu’elle a de plus primaire, l’auteur nous montre que la société dans laquelle nous vivons n’est peut-être pas une évidence – discours qui ne pouvait pas trouver meilleur écho qu’en cette période.

Un style graphique saisissant de réalisme

Et le récit s’ancre d’autant plus facilement dans notre quotidien que le style graphique est lui-même saisissant de réalisme. Détaillées et rigoureusement travaillées, les images qui s’inscrivent dans une vision certes un peu classique de la bande dessinée franco-belge n’en sont pas moins très agréables à regarder. Les couleurs en demi-teinte – avec une palette qui oscille principalement entre le rose, le orange et le turquoise – ajoutent une dimension mélancolique à l’histoire et permettent à l’auteur de créer des ambiances très particulières en jouant sur les ombres et la lumière. La Chute, premier volet d’une saga en six chapitres, n’est pas seulement un récit visionnaire, c’est aussi une œuvre joliment réalisée et bien ficelée, qui capte le lecteur sans jamais le relâcher.