Gloria Bell, auto-remake intelligent et grandes performances d’acteurs

Gloria Bell
de Sebastián Lelio
Comédie dramatique
Avec Julianne Moore, John Turturro, Michael Cera, Jeanne Tripplehorn, Brad Garrett
Sorti le 1er mai 2019

Quand Gloria, cinquantenaire et divorcée de longue date, entame une relation passionnelle avec Arnold, divorcé depuis à peine un an, elle s’embarque dans un cercle vicieux alimenté par la personnalité peu affirmée de son nouveau compagnon, encore accaparé par les fantômes de son ancienne vie. Mais cette expérience pénible sera pour Gloria l’occasion de trouver de la force en elle et de s’assumer pleinement.

En réalisant lui-même le remake de son propre film (Gloria, 2013), le chilien Sebastián Lelio s’expose évidemment au risque de l’exercice de style superflu mais s’en sort finalement assez bien, arrivant par sa direction d’acteurs et ses choix de mise en scène toujours effectués dans un esprit de déplacement, de petits glissements, à égaler voire même à surpasser en émotion l’impact du film original.

Jouant par exemple sur les effets de miroir en inversant parfois la composition des plans d’un film à l’autre, Lelio développe une vraie dialectique entre les deux films et donne une dimension réflexive, presque méta à son remake, pour peu que l’on prenne la peine de voir ou de revoir l’original après ou avant la vision de celui-ci.

D’autre part, le cinéaste semble également accepter les règles d’un cinéma peut-être plus lisse, plus glamour que le sien, ce qui, au final, semble être tout à fait bénéfique au film. Là où Gloria était fait de plans rapprochés parfois ingrats et était phagocyté par un naturalisme encombrant – notamment dans la manière de filmer, caméra à l’épaule –, l’emploi d’une caméra plus fixe et de plans plus larges libère Gloria Bell de ce carcan esthétique qu’un « refilmage » pur et simple de la première formule aurait probablement induit.

On pourrait également parler longuement de l’utilisation de la musique, encore plus présente dans le remake et scandant le film avec une allure de métronome. Mais il faut aussi et peut-être surtout parler des deux acteurs principaux (Julianne Moore et John Turturro) qui, sans rien retirer à leurs homologues chiliens – Paulina García et Sergio Hernández, également très bons –, livrent tous deux l’une de leurs meilleurs performances et confèrent au film une certaine suavité qui collabore à singulariser ce film-ci par rapport à son modèle.