Suikerrock 2016 Jour 2 : Pop et Rock aux couleurs nationales

 

Le jour 2, fut celui des artistes féminines, qui assurèrent les trois premiers concerts, et des artistes belges plus généralement, puisque à la large majorité de groupes flamands, parmi les plus réputés, s’ajoute la Montoise Alice On The Roof à l’occasion du seul jour où la programmation est exclusivement noir-jaune-rouge.

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Après Noémie Wolfs, ex-Hooverphonic, en tournée pour promouvoir son premier album solo Hunt You, bien porté par l’électro-pop du single Burning, et Billie, surtout connue pour avoir été la voix du We Can Only Live Today de Netsky il y a quelques années, on peut dire sans aucune volonté d’offenser que c’est à partir d’Alice que la journée allait réellement devenir intéressante.

Alice On The Roof

A tout juste 21 ans, la jeune Montoise continue sa progression de façon linéaire. Sa voix délicate et sa synthpop sont toujours au rendez-vous et d’ailleurs Higher, son premier album solo sorti en janvier, reprenait pas moins de trois titres de son premier EP, sorti lui en avril 2015. La continuité, tout en étant un peu plus sophistiqué : autour du trio chant/batterie/synthé sont venus se greffer en live deux nouveaux musiciens, sur synthé aussi principalement, mais n’hésitant pas à saisir à l’occasion une guitare et un violon (Race In The Shadows) ou une basse (Easy Come Easy Go), ce qui apporte à chaque fois un plus indéniable. Ce qui n’apporte en revanche pas de plus indéniable, c’est lorsque prend à Alice l’envie de taper sur des pads avec une baguette lumineuse. D’accord, ce sont des petits fragments de sa propre voix qu’elle envoie à tours de bras mais concédons que l’artifice a surtout un intérêt visuel.

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Sinon, Princes, la reprise d’Oscar and the Wolf qui a véritablement lancé sa carrière, est toujours aussi efficace ; tout comme le sexy et groovy Feel Tonight, l’un des meilleurs moments de Higher. Côté reprise, ajoutons en plus le Dancing Queen d’ABBA qui confirme qu’Alice a le chic pour mettre à sa sauce les compos des autres. Le léger Sound of Drums vient conclure le set au bout de 50 minutes. A noter enfin : un gain d’assurance scénique indéniable (par rapport au BSF 2015) que probablement seule l’accumulation des concerts peut apporter.

Tourist Le MC

Le MC anversois Johannes Faes est de toute évidence à la croisée des chemins et fut en tout cas une belle découverte. Ses rimes en néerlandais sur une bande son mi-hip-hop, mi-folk l’ont conduit jusqu’à la finale du Humo’s Rock Rally en 2012, avant de lui rapporter 5 nominations dont 2 prix (catégories « néerlandophone » et « découverte ») aux Music Industry Awards flamands en 2015. Pour couronner le tout, il remplira même la Lotto Arena en novembre prochain puisque la salle ne propose déjà plus qu’une liste d’attente.

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Musicalement, le qualificatif « mi-hip-hop, mi-folk » est en fait très réducteur tant l’input instrumental des 5 musicos qui l’accompagnent est riche et varié : mi-hip-hop, mi-folk, mi-jazz, mi-reggae, mi-rock, mi-funk serait plus proche de la réalité. Loin de proposer un melting-pot global et opportuniste, incolore et insipide, le combo souligne une ambiance et un style plus marqué à chaque morceau ou presque. Le guitariste passera de l’électrique à l’acoustique et vice-versa, puis de backing vocals à un lead profondément reggae pendant que le saxophoniste alternera soprano et alto et que le batteur apportera une assise rythmique solide mais versatile.

Pas besoin de comprendre le sens de chaque mot pour réaliser que le morceau Liefde, Liefde (2013) révèle toute sa puissance en live. Enfin, le thème du voyage et de l’immigration, celui de l’avenir et du destin (« mektub ») reviennent à plusieurs reprises et semblent indiquer une aspiration à un hip-hop « conscient » bien loin du bling-bling, des dollars et des grosses cylindrées. Il y aura bien une courte reprise instru de Still D.R.E à un moment mais ça, ce n’est pas que de l’esbroufe…c’est culte ! Une autre reprise, en apparence moins tendance, celle de Meneer de President de Boudewijn de Groot (protest song anti-Vietnam sortie des sixties) viendra confirmer la portée sociale et politique des textes que déclame le Tourist.

Balthazar                                           

Ces véritables chouchous de la critique et du public au nord du pays ont commencé avec un retard inhabituel de 20 minutes, en bénéficiant toutefois du créneau le plus enviable en ce deuxième jour (21h30-22h30). Voici d’abord un aperçu de leur carrière en chiffres : trois albums studio depuis 2010, dont les deux derniers n°1 et n°2 des ventes en Flandre, tous auréolés du prix de « meilleur album » aux annuels Music Industry Awards (un record !) Le tout agrémenté de concerts au Royaume-Uni et aux Etats-Unis, et d’apparitions dans les plus gros festivals d’Europe : Rock en Seine, Glastonbury, Pinkpop, sans oublier notre Werchter national.

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La formation emmenée par Maarten Devoldere et Jinte Deprez, un quintette classique à deux guitares avec Patricia Vanneste qui alterne régulièrement clavier et violon, a de quoi impressionner sur le papier. Les singles du dernier Thin Walls (2015), comme Wait Any Longer ou Bunker, étaient attendus mais valent bien une écoute en live. Toutefois, ce sont les anciens Blood Like Wine et Fifteen Floors, tirés du premier Applause (2010), qui par le chant ou par la danse suscitent le plus de réactions dans la foule. Musicalement, on se trouve face à un rock indie sérieux, mélancolique, monochrome, bien interprété mais pas bien original, ce qui peut certainement finir par en lasser certains au bout de 40 minutes. Rayon satisfactions, on peut souligner le bel aspect choral des voix en ce que tant les lead que les backing sont presque toujours partagées par tous. Balthazar est un « vrai » groupe, qui a le sens du collectif, et ce n’est pas la disposition des 4 musiciens sur la même ligne à l’avant-scène qui va nous faire penser le contraire.

dEUS

Voilà une nouvelle fois des finalistes du Humo’s Rock Rally, vivier intarissable, mais eux c’était en…1992. Si le groupe de Tom Barman est un fleuron du rock belge depuis près de vingt ans maintenant, il se fait aujourd’hui plus rare (deuxième date de l’année seulement, après le Gent Jazz mi-juillet) et on peut franchement le regretter au vu de l’énergie et de l’intensité insufflées pendant un show de près de deux heures.

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Depuis le grand chambardement de 2005 qui a vu les arrivées combinées de Mauro Pawlowski (guitare lead), Alan Gevaert (basse) et Stéphane Misseghers (batterie), chacun de leurs quatre albums a été n°1 en Flandre et le groupe a affiché un parcours artistique sans fautes. Mais l’avant-Vantage Point est loin d’être inintéressant, raison pour laquelle chacun de leurs sept albums studio était de la partie à Tirlemont, proposant un setlist généreux et exhaustif même, en forme de rétrospective. Une grande majorité de leurs singles ont été joués, de Little Arithmetics (1996) à Sirens (2013), mais pas de trace de 7 Days, 7 Weeks ou de What We Talk About (When We Talk About Love), pourtant des cartons à l’époque. Trop prévisibles peut-être, et puis il s’agit aussi de laisser un peu de place pour les bouillonnants Sun Ra, Bad Timing ou Suds & Soda qui les valent certainement en configuration live. Le célèbre The Architect arrive tôt dans le set mais permet de véritablement lancer le concert. Quant au (sur)prenant Quatre mains et sa prose française, il passe sans encombres du (brillant) clip vidéo à la scène. Une basse nerveuse et de longs passages instrumentaux noisy sont légions, ce qui prête inévitablement à sourire en réalisant le paradoxe mis en place par le groupe au moment d’intituler sa tournée « Soft Electric Tour ».

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L’expérience et le métier de ce groupe sont aussi palpables qu’indiscutables ; celui-ci fut acclamé du début à la fin par un public très présent, visiblement acquis à sa cause, et plus encore peut-être que Deep Purple la veille.

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