La question du politiquement correct, qu’en dit-on « Chez Nous » ?

Chez Nous

de Lucas Belvaux

Drame

Avec Emilie Dequenne, André Dussollier, Guillaume Gouix

Sorti le 1er mars 2017

N’en déplaise à Florian Philippot, le dernier film du belge Lucas Belvaux dresse un portrait peu flatteur, non seulement de la politique en général, mais des partis plus nationalistes en particulier. Chez Nous, c’est l’histoire d’une aide à domicile, Pauline (interprétée par Emilie Dequenne), qui, malgré son manque de connaissance en la matière se présente, sous l’influence de son bienveillant médecin de famille, sur la liste du Bloc Patriotique. Mais, l’essence même de ce film étant le caractère engagé que lui revendique le réalisateur, Chez Nous c’est surtout l’histoire d’un parti populiste fictif qui promeut la violence et la haine, vices cachés derrière le politiquement correct et l’image lisse de candidats méticuleusement choisis.

La plus-value de ce film n’est pas tant la démarche cinématographique qui l’accompagne que son propos. En effet, le film en lui-même n’est pas très juste pour ce qui est du timing et n’apporte rien de très novateur. Par ailleurs, même si cela est voulu au vu du sujet, les personnages et les situations sont souvent trop stéréotypées. Ne peut-on pas être une petite fille et pratiquer un autre sport que celui de la danse classique ? N’est-il pas possible d’habiter la campagne et d’avoir du goût en matière de décoration d’intérieur ? Véhiculant certains clichés un peu faciles, il n’est pas étonnant que le film lui-même paraisse trop manichéen ; entre les mauvais racistes, les bons qui ne le sont pas et les moins informés qui se laissent manipuler. D’ailleurs, il est assez paradoxal pour un film qui critique la discrimination de se laisser piéger par de telle catégorisation.

Mais, malgré ses faiblesses, le message de Chez Nous reste très intéressant. Cette comédie ne semble, en effet, pas tant pointer du doigt en particulier un parti ou un personnage public mais bien de manière plus générale des comportements et des idées. La critique est en effet adressée, premièrement, aux politiciens et politiciennes dont le seul but est de récolter des voix quoiqu’il en coûte et, secondement, aux personnes de toutes professions qui font l’éloge du discours raciste, synonyme de violence.

Pourtant, comme s’en insurge le FN, paraissent possibles certains liens entre des personnages imaginés par Belvaux et des adhérents dudit parti. Et si cela semble critiquable d’un point de vue éthique, à quelques semaines seulement de l’élection présidentielle française, ces associations ne paraissent, finalement, pas primordiales, le but même du film étant de soulever des questions d’ordre plus général. Il est d’ailleurs intéressant de constater que depuis que des réactions se sont fait entendre au sein du parti d’extrême droite, le film fait de plus en plus parler de lui. Il serait normal de se demander si, stratégiquement, il n’aurait pas été préférable de laisser passer l’affront.

Par ailleurs, et cela est peut-être le point le plus intéressant, Chez Nous rappelle que l’art, dans sa définition propre, à une valeur de propagande. De Platon à Eisenstein, de tout temps, l’art fut également réfléchi comme impliqué dans les affaires de la vie politique. Et de manière plus contemporaine, la gauche, comme la droite ont eux aussi déjà fait l’objet de représentations cinématographiques, souvent peu favorables d’ailleurs.

Libre à chacun, donc, de comprendre Chez Nous comme étant engagé ou diffamatoire, méritant ou condamnable, pacifiste ou discriminatoire. Il est néanmoins intéressant, pour se faire sa propre opinion, de prendre connaissance du discours de ce film.