Le Pélican au Théâtre Varia

De August Strindberg, mise en scène de Jeanne Dandoy, avec Chloé de Grom, Sanders Lorena, Catherine Salée, Yamina Takkaz, Julien Vargas. Du 14/11 au 25/11/2017 au Varia.

Attention, c’est une adaptation ! Voilà ce qu’il aurait fallu inscrire en grand sur l’affiche de cette pièce de théâtre. En effet, pour accommoder Le Pélican à notre époque, Jeanne Dandoy n’a pas seulement adapté la mise-en-scène, mais elle a également réécrit le texte. Pour ceux qui voudraient réentendre les dialogues d’origines, ils risquent peut-être d’être déçus.

Déçu ? Pas vraiment ! Les thèmes abordés par cette pièce qui peuvent rendre mal à l’aise sont biens présents. Lorsque la trame commence, lorsque les différents sujets s’ouvrent, nous sommes envahis par un malaise. Le ton est agréablement malsain et froid. Le temps que l’on découvre les personnages, on ne sait dire lequel est le plus étrange et aussi auquel se fier. Cinq comédiens qui nous content l’histoire étrange d’une famille meurtrie par le temps. Au centre de ces discussions, le cercueil du père de famille, ancien colon d’Afrique. Le passé va petit-à-petit revenir à la surface et révéler les secrets de chacun. Des blessures que l’on va rouvrir pour mieux les cicatriser. La confiance d‘une famille mise à mal par ce deuil.

Le décor est magnifique. On joue sur des rideaux transparents qui délimitent les lieux et qui permettent quelques jeux en arrière-plan comme des souvenirs qui réapparaissent. Et comme c’est à la mode, certaines tables dans le décor bougent toutes seules. De quoi ajouter un peu d’angoisse à l’histoire. Et quand la lumière nous pousse à perdre le regard d’un côté, le décor change de l’autre.

Dans les comédiens, nous retrouvons Catherine Salée que nous avions vue dans La Trêve. Son hystérie est attendrissante. D’abord on la déteste, puis elle devient touchante. Julien Vargas mène la barque avec un personnage ivre de sympathie avec quelques spontanéités d’humour. Sanders Lorena, le plus jeune, est en train de finir ses études au Conservatoire de Liège. Sa prestation nous annonce un avenir très prometteur. Malheureusement, on sent Chloé de Grom plus distante, plus effacée. Une voix en murmures malgré le micro et une démarche qui traine sur la scène. Mais le duo des jumeaux, frère et sœur, est beau et très crédible.

La pièce démarre en douceur. Même un peu trop lentement peut-être. Mais l’histoire s’emballe, les vérités se révèlent et à chaque nouveau dialogue, une parcelle de l’histoire familiale nous apparaît. Et notre avis sur feu le père change continuellement. Qui est le personnage le plus horrible dans cette histoire finalement ?

Alors, oui, c’est du Strinberg car les thèmes qui dérangent et qui font réfléchir sont bien présents. Mais le texte d’origine nous manque un peu. Une chance, le tout est rattrapé par d’excellents comédiens et un très beau décor qui met le feu à cette pièce.

A propos Christophe Mitrugno 62 Articles
Journaliste du Suricate Magazine