« La peau est la membrane élastique qui enveloppe l’ensemble du corps »

Titre : La peau est la membrane élastique qui enveloppe l’ensemble du corps
Auteur : Bjørn Rasmussen
Editions : Bleu et Jaune
Date de parution : 11 mars 2021
Genre : Roman

Ayant remporté en 2016 le prix de la littérature européenne ainsi que le montanas litteraturpris– et accessoirement peut-être celui du plus long titre de l’histoire du livre – La peau est la membrane élastique qui enveloppe l’ensemble du corps a été choisi pour inaugurer la collection fiction internationale des Éditions Bleu et Jaune, sans surprise, puisque le mot d’ordre de cette petite structure française est l’abolissement des frontières culturelles et la déconstruction des codes de l’écriture. En découvrant la quatrième de couverture qui nous promet une expérience littéraire extravagante mais enrichissante, contrastant avec le caractère ultra-kitsch et déjà-vu de la présentation graphique du livre, on ne peut qu’être curieux de découvrir dans quel monde parallèle on va bien pouvoir atterrir. On s’attend à un ovni et on n’est pas déçu.

Le synopsis est simple, il n’y en a pas. Se détachant des carcans de la narration traditionnelle, l’ouvrage nous plonge dans les élucubrations d’un être en transition, sans sexe défini, et dans la relation amoureuse tumultueuse – voire même sadomasochiste – qu’iel entretient avec son professeur d’équitation. Le livre se présente sous forme de passages qui semblent à la fois vécus et rêvés, comme si le personnage lui-même flottait dans sa vie, comme s’iel flottait dans son corps – car, ainsi que le suggère le titre, le corps, et plus précisément l’enveloppe corporelle, occupe une place centrale dans cet essai inclassable. Bien entendu, l’auteur danois Bjørn Rasmussen, dont c’est le premier ouvrage, en profite pour se jouer de la sexualité des corps, mais aussi du caractère périssable de la peau – faisant se côtoyer la vie et la mort.

On pourrait s’attendre – ou plutôt on s’attendait, surtout après avoir parcouru rapidement les premières pages –  à une littérature érotique. Et pourtant nous sommes bien loin du roman pornographique que nous avions imaginé car la sexualité, qui ne sert pas de prétexte à l’écriture, est racontée de manière crue, directe, dénuée de sensualité et de lyrisme. Tout ce qui a trait au désir n’est utilisé dans le récit que pour souligner les affres de l’amour et le rapport ambigu que quelqu’un peut entretenir avec son corps.

La peau est la membrane élastique qui enveloppe l’ensemble du corps, en sortant des sentiers battus, ne plaira pas à tous. Pleins de métaphores – l’auteur adopte une écriture qui, comme le corps, n’a pas de limite, qui se détache des normes – cet essai s’adresse à un lectorat réceptif aux exercices de style et qui ne cherche pas, dans un livre, à retrouver une trame scénaristique ficelée.