Jours d’enfance de Michiel Heyns

auteur: Michiel Heyns
éditions : Philippe Rey, collection Fugues
date de sortie : 16 octrobre 2014
genre : Poche, historique, humour, apartheid

Dans ce très beau roman d’apprentissage écrit en 2002, Michiel Heyns nous livre une peinture de l’Afrique du Sud avant l’ère Mandela dans un climat diffus de rivalités entre Afrikaners et Anglais à la fin des années 60.

A Bloemfontein, ville de l’Etat libre d’Orange, le 6 décembre 1968 n’est pas un jour comme un autre pour Simon et ses copains du collège anglais. Ils attendent de pied ferme de jeunes Afrikaners issus d’une école technique des environs, plus que prêts à infliger une correction bien méritée au tennis à ces bas du front néerlandophones qu’ils méprisent ouvertement. Les visiteurs débarquent et, parmi eux, Simon reconnait dans un de ces adversaires du jour une vieille connaissance, Fanie van den Bergh. Ce dernier a partagé l’enfance de Simon à Verkeerdespruit, une triste bourgade où l’Apartheid règne en maitre. Au fil de la journée, aux côtés de son vieux camarade de classe dont il est honteux, Simon exhumera peu à peu des souvenirs douloureux empreints de conflits raciaux et de luttes de classe.

Les souvenirs du jeune homme à la double identité, fils d’un magistrat anglais libéral et d’une Afrikaner, font l’objet d’une excavation bouleversante sur une société conservatrice et raciste dans laquelle tout comportement déviant est impitoyablement chassé. Ses réminiscences servent également de sésame pour revisiter la pensée et le psyché d’un jeune enfant. L’écriture de Michiel Heyns sait poser des mots là où l’enfance parsème candeur, ignorance et questionnements. Dans ce petit village d’Afrikaners blancs flanqué de Bantous logés dans le township où le pasteur et sa femme contrôlent tout, où une poignée de notables aiment jouer aux bourreaux, les enfants apprennent la vie et ses revers : l’hypocrisie morale ambiante, l’éveil à la sexualité, les trahisons, le conservatisme raciste, les amitiés compliquées,…

En passant de l’ombre à la lumière, de la périphérie où sont relégués les stigmates de l’enfance au centre des réflexions d’un jeune homme en devenir, Michiel Heyns parvient à donner à son récit une amplitude intéressante par l’écriture de ce double regard et de ces allers et retours dans le passé.

Si son livre rend bien le grain d’une époque et tire sa grâce de ses regards étonnés sur le monde d’adultes, sa réussite a cependant des limites. Trop de souvenirs font écho à des problèmes de pédophilie et d’homosexualité. On aurait apprécié qu’il creuse un peu plus du côté de la ségrégation raciale.

Quoi qu’il en soit, dans ce roman tantôt cruel, tantôt tendre, Michiel Heyns manie l’humour et l’ironie à la perfection et parvient, à travers l’évocation des jours d’enfance de Simon, à capturer l’essence des conflits intérieurs d’une société en devenir.

Jours d’enfance a été traduit de l’anglais par Françoise Adelstain en 2010.
Il ressort en poche cette année dans la collection fugues des éditions Philippe Rey.

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