« Les Imparfaits », troublante dystopie

Titre : Les Imparfaits
Auteur : Ewoud Kieft
Editions : Actes Sud
Date de parution : 2 février 2022
Genre : Dystopie, Science-Fiction

Premier roman d’Ewoud Kieft, un historien et écrivain dont deux essais sur la fascination qu’exercent la guerre et le nazisme lui ont valu d’être nommé pour le Libris Geschiedenis, Les Imparfaits nous plonge dans une société hypercontrôlée où la relation homme-machine a atteint un niveau d’intimité jamais atteint auparavant.

2060. Cas est un jeune homme qui a grandi dans un monde où l’intelligence artificielle fait partie intégrante du quotidien. Autrefois simple application pratique, elle s’est élevée au rang de fidèle partenaire sous le nom de Gena, qui assiste Cas dans toutes ses décisions et connaît mieux que quiconque les événements majeurs de son existence. Mais lorsque Cas disparaît sans laisser de traces, séduit par le discours d’une caste dissidente, les Imparfaits, qui refuse l’assujettissement aux algorithmes, c’est à Gena que l’on demande des comptes.

Le roman d’Ewoud Kieft aborde plusieurs thèmes et parvient à nous toucher personnellement dans cette dystopie qui n’en a souvent que le nom. Ainsi, certains seront frappés par les similitudes entre la vie de ce jeune homme et l’addiction au virtuel dont souffrent déjà de nombreuses personnes à l’heure actuelle. D’autres seront fascinés par la justesse avec laquelle l’auteur nous décrit le processus de radicalisation du héros, utilisant des arguments que l’on peut déjà entendre dans nos sociétés fissurées.

Peu importe au final la manière dont le lecteur s’identifiera aux différents protagonistes et entrera dans ce récit, il ne pourra pas en sortir sans s’être posé de sérieuses questions sur notre société en devenir.

Est-il éthique de manipuler les gens pour le bien commun ? Qu’en est-il de notre libre arbitre ? L’intelligence artificielle peut-elle atteindre un niveau de conscience ? Au vu des questions qui se posent dans nos démocraties sur l’opportunité d’appliquer temporairement certaines mesures d’exception d’une part et des expérimentations à grande échelle qui se produisent dans des régimes autocratiques d’autre part, les interrogations soulevées par ce captivant roman sont tout à fait légitime.