Das Feuer ou la guerre au quotidien

Scénario : Patrick Pécherot, daprès le roman de Barbusse
Dessin : Joe Pinelli
Éditions : Casterman
Sortie : 14 novembre 2018
Genre : Historique

Casterman nous propose « Das Feuer », inspiré du roman « Le feu » de Barbusse, prix Goncourt en 1916. Au scénario, on retrouve Patrick Pécherot, romancier, auteur notamment du livre « Les Brouillards de la butte » (Grand Prix de littérature policière en 2002). Quant à la partie graphique, elle est prise en charge par Joe Pinelli, déjà publié chez Aire Libre et Rivages Noir.

« Das Feuer » nous raconte l’histoire d’une nuit dans une tranchée allemande et dans le no man’s land qui la sépare de la ligne ennemie. Sous une pluie battante, un groupe de soldats tentent de rejoindre les leurs, perdu dans une mer de boue, de cadavres et de sang. Après quinze mois de combats, la guerre a déjà englouti leurs espoirs et un grand nombre de leurs camarades. Malgré cela, ils luttent encore, principalement contre eux-mêmes et contre les éléments, pour survivre une nuit de plus.

Tant d’un point de vue graphique que scénaristique, les auteurs nous transportent dans un cauchemar éveillé durant les 200 pages du récit. On suit la voix du narrateur qui égrène les horreurs de la guerre, l’absence d’espoir et l’absurdité de toute cette boucherie. Afin de dénoncer la guerre en elle-même, et non un camp en particulier, Pécherot et Pinelli ont transposé l’action du roman original dans les tranchées allemandes.

D’un point de vue graphique, tout se joue dans les nuances de gris, tout est sombre. Les lignes de démarcation entre les hommes et le décor sont floues. Les deux semblent ne faire plus qu’un. D’ailleurs, qui sait si cette colline n’est pas en réalité un amas de cadavres ? Le no man’s land se nourrit des corps déchiquetés et n’est plus qu’un amas de boue, d’obus et de cadavres. Dans ce dessin tout en nuances, où les hommes sont des ombres, cadavres en devenir, chaque élément du décor peut se révéler être vivant ou mort.

Loin des récits héroïques, l’album de Pécherot et Pinelli présente la guerre pour ce qu’elle est au quotidien : l’horreur. Tout est noir dans « Das Feuer » et doit le rester, car comme le dit le narrateur en guise de conclusion : « La bêtise et l’oubli sont des péchés et des crimes. Le silence n’aura d’autre conséquence que la répétition des événements ».