La Vallée des Loups, il enrichit nos rêves

La Vallée des Loups

de Jean-Michel Bertrand

Documentaire

La première fois que l’on rencontrait ce savant fou de la nature, il était, dans Vertige d’une rencontre, à la recherche d’aigles, le majestueux des airs. Aujourd’hui, il revient pour une nouvelle quête, à la recherche de celui des terres. Quelque part au cœur des Alpes, Jean-Michel Bertrand nous embarque dans une véritable chasse au trésor, à la recherche des loups sauvages qu’on dit revenus.

Pendant près de trois ans, le documentariste livré à lui-même, sans la moindre promesse de distribution, s’entête dans le projet fou de retrouver l’animal dans l’immensité de la forêt. Comme privé de la vue, Jean-Michel Bertrand, touche, sent, dessine, trace, pense jusqu’à l’espoir, parfois jusqu’au désespoir, avec toujours le même respect de son environnement et cet autre, en même temps présent mais invisible.

A mille lieues de documentariste de type Grizzly Man, le culte que Jean-Michel Bertrand voue aux loups s’entretient d’une volonté de préserver les meutes de l’homme, le documentariste reste vague sur la géolocalisation et son parcours. On le voit se balader, aller, venir, repartir et bien que les saisons permettent d’apporter quelques repères temporels, la narration reste tout de même opaque. Mais en considérant les choix narratifs en conséquence de ses choix éthiques, peut-on vraiment reprocher une clarté qui engagerait le péril de ce qu’il s’adonne à protéger ?

Esthétiquement, les décors, divinement silencieux, font tout le travail et contrebalancent le caractère parfois amateurs d’images dont l’acteur et le caméraman ne font qu’un. Les caméras infrarouges qu’il place stratégiquement un peu partout comme autant de petits espions silencieux, amènent du rythme visuellement et une nouvelle charge narrative qu’il nous tarde chaque fois de découvrir.

Au fil de la quête au Saint Graal, émerveillé tantôt par un excrément, tantôt par une morille, l’amour que porte le documentariste pour la forêt dans laquelle il a grandi devient palpable et finit par porter le film au-delà de l’histoire. L’enquête tire un peu sur la longueur, mais face à ce véritable rêve de gosse en train de s’accomplir, on ne peut s’ennuyer de ce regard émerveillé, persuadé qu’en y croyant aussi fort que lui, le rêve s’accomplira.

A propos Audrey Lenchantin 56 Articles
Journaliste du Suricate Magazine