Rings of Power
Réalisateur : J. D. Payne et Patrick McKay
Genre : Fantasy
Acteurs et actrices :Morfydd Clark, Charlie Vickers, Charles Edwards
Nationalité : USA
Date de sortie : 2022-
Le nerf de la guerre des plateformes de streaming est d’alimenter celles-ci en contenu de manière régulière afin de garder ses millions d’abonnés captifs. Et rien de tel pour ce faire que de proposer, en plus d’un catalogue de films et séries plus anciens, des grosses productions qui rassembleront des dizaines de millions de spectateurs. Rings of Power, série aux ambitions gigantesques – un budget digne d’une production hollywoodienne pour un plan initial de cinq saisons – est assurément de celle-ci, voulant capitaliser sur le phénomène culturel qu’est devenue l’œuvre de Tolkien.
De la difficulté d’adapter un tel univers
Si la perspective d’un budget mirifique et d’un engagement à long terme peut sembler alléchante pour un réalisateur, celle-ci ne vient pas sans contrepartie, phénomène que l’on a déjà pu observer avec Fondation, la série-événement proposée par Apple basée sur le cycle de romans d’Isaac Asimov. Car même si on promet une immersion sans pareil et un final grandiose aux spectateurs, il ne faut pas les perdre le long de ce – très long – chemin.
La durée de l’engagement est un premier point critique, que l’on ressent d’ailleurs dans la première saison de Rings of Power, qui, comme le premier acte pour un opéra, ne sert qu’à introduire les différents protagonistes. Si cet étalement semble justifier pour les scénaristes qui connaissent la découpe de la saga, c’est parfois plus compliqué à accepter pour un spectateur lambda.
Et quant à parler des protagonistes, évoquons dès lors le second point de friction, à savoir l’étendue de l’univers envisagé. Cette saga étant un prélude à la trilogie de Lord of the Rings, les réalisateurs, dans un souci d’exhaustivité, nous présente dès lors tous les arcs narratifs – elfes, humains, nains, orques,… – de toutes les races de la Terre du Milieu en décrivant en détail comment les personnages qui apparaissent au cinéma dans la trilogie de Peter Jackson en sont arrivés là. Ce qui pose parfois des problèmes pratiques, à savoir se souvenir de ce qui s’est passé dans tel arc narratif un ou deux épisodes précédents, la dernière fois qu’il a été abordé.
Le dernier point négatif a trait à la cohérence vis-à-vis de l’œuvre originale. Si, pour reprendre l’exemple de Fondation, les scénaristes peuvent se baser dans ce cas précis sur une littérature abondante, dans le cas présent, Tolkien nous a laissé une trame et de nombreux indices, mais pas un matériel prêt à l’emploi pour cinq saisons. Les puristes de l’œuvre se plaindront dès lors que tel ou tel personnage n’auraient jamais dû se rencontrer ou d’autres incohérences dues à la nécessité de créer une histoire cohérente pour le cinéma.
De l’intérêt de l’avoir adapté
Si l’œuvre présente certains défauts, elle regorge néanmoins de nombreuses qualités.
Un des mérites des réalisateurs est d’avoir mis en image un univers iconique, qui, grâce à l’amélioration des techniques visuelles depuis la parution de la trilogie au cinéma, est d’une beauté à couper le souffle. Un univers qui, contrairement à The Hobbit, contient une intensité dramatique que ne possédait pas ce dernier.
D’autre part, scénaristiquement, après avoir vu deux saisons, on commence à comprendre l’évolution des arcs narratifs et on s’y intéresse d’autant plus que plusieurs protagonistes importants se dévoilent, même si la qualité des dialogues n’est pas toujours à la hauteur et que certains traits – la corruption des esprits qui mènent à la création des anneaux – sont forcés.
De plus, même si les grandes scènes de bravoure ne sont pas si courantes, elles sont toujours extrêmement impressionnantes, et particulièrement le final de la seconde saison.
Une œuvre qui demande de la patience
Pour toutes les raisons évoquées ci-dessus, Rings of Power est une œuvre qui demande des efforts et une certaine patience afin de l’apprécier pleinement. Sa longueur, le large éventail de thématiques qu’il embrasse et un certain manque de subtilité pourraient en décourager plus d’un et c’est bien dommage au vu de la qualité de la réalisation. Il ne reste à espérer qu’Amazon, au vu des résultats plus modestes de la seconde saison, acceptera de financer les trois saisons restantes.