De et avec Arco Renz & Danielle Allouma
Les 6 et 7 juin 2025
Aux Brigittines
Après REvolution 2349, la danseuse Danielle Allouma et le chorégraphe Arco Renz poursuivent leur recherche sur le corps en rotation. Partant de la tension entre le carré et le cercle, le langage chorégraphique se joue entre un cadre restreint et un mouvement de liberté qui cherche à échapper à ce cadre.
Habillée d’une structure souple composée de trois carrés grillagés de couleurs différentes (blanche, rouge, jaune), elle a pris place dans une faible lumière rougeâtre. Une voix se fait entendre, elle commence à tourner sur elle-même, dans le sens des aiguilles d’une montre (si l’on regarde d’en haut). Elle va poursuivre ce mouvement circulaire pendant près d’une heure.
Mais Danielle Allouma ne fait pas que tourner. Elle manipule les trois pans grillagés d’abord superposés, les faisant tournoyer à bout de bras, y enserrant ses épaules, les utilisant comme un drapé, les posant sur la tête, les enroulant autour d’elle, … La danseuse les lâche un à un, et ajoute à sa chorégraphie des mouvements de bras, asymétriques, un bras tendu l’autre en l’air. Elle libère ses cheveux, lève les bras au ciel et adopte le mouvement d’une ballerine classique. Elle ralentit, s’arrête, rattache sa chevelure, saisit une barre chromée et reprend sa révolution, inlassablement, manipulant l’accessoire comme une barre fixe, un javelot, une pagaie ou un balai de sorcière.
REbis7 est le deuxième volet d’une trilogie (en devenir) entamée avec REvolution 2349, où le duo explorait la note « Ré » et sa fréquence de 2349,32 Hz à travers la danse et la perception sensorielle. La troisième partie devrait porter sur la question de la relation d’un élément extérieur à la personne et au corps. « La suite sera la continuation de ce travail dans autre chose », sourit le chorégraphe et metteur en scène Arco Renz qui envisage de rassembler les trois pièces dans une seule performance, d’ici deux ans.
Autour d’une pratique qui peut apparaître minimaliste, Arco Renz et Danielle Allouma développent une réflexion métaphysique et mystique. La nouvelle création met, en effet, en scène une figure spirituelle et androgyne qui se confronte à la symbolique du chiffre 7. Le chiffre 4 est ici associé à la matière – 4 saisons, 4 points cardinaux, etc. Le chiffre 3 évoque le sacré ou le divin – la Trinité hindoue, la Divinité chrétienne, etc. Et 3 plus 4 est égal à 7.
Le mouvement répétitif est associé aux derviches tourneurs (qui tournent dans le sens contraire des aiguilles d’une montre) mais l’approche des créateurs est tout à fait inverse. Selon Arco Renz, on peut tourner dans un geste méditatif pour disparaître alors que, dans la trilogie, ce mouvement, qui nécessite conscience et attention à la chorégraphie, a pour objectif de faire apparaître quelque chose. Le spectacle se veut, en effet, un hommage à la métamorphose et à l’émancipation des schémas binaires habituels, proposant une quête de liberté et l’exploration d’un monde inconnu, à construire.
Considérant le carré et le cercle comme des éléments binaires par excellence, Arco Renz fait également référence à un problème mathématique impossible à résoudre. La quadrature du cercle, devenue synonyme de problème insoluble, consiste à tracer un carré de même surface qu’un cercle donné, avec une règle et un compas. Sur scène, Danielle Allouma est confrontée à la structure carrée de l’environnement et négocie donc le cercle de son mouvement dans le carré extérieur à son corps.
La performance hypnotique et physique mélange intimement musique, danse, et lumières créées par Ryoya Fudetani. Élément clé du spectacle, la lumière et la scénographie s’appuient également sur la présence au sol d’une poudre blanche. Destinée, à la base, au confort des pieds de la danseuse, il s’est avéré que la farine de tapioca, choisie après de longues recherches (toutes les farines du monde ont des textures différentes), a la particularité de rendre les couleurs de la lumière vibrantes. En outre, elle souligne les traces du mouvement qui se forme.