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    Polygone, un robot en eaux troubles

    Imaginez un monde où les robots géants ne sont pas le futur, mais le passé. Un monde dans lequel l’espoir d’un salut numérique a laissé place à la désillusion. Fatigués de la ville et de ses fausses promesses, Paula et son compagnon se sont offert un retour aux sources. Emportant avec eux leurs quatre enfants, ils se sont dégotés un coin isolé, où la nature a repris ses droits sur les ambitions humaines. Mais leur quotidien paisible s’apprête à changer lorsque l’un des fils, Loe, tombe sur la carcasse d’un robot géant qu’une énième tempête a fait échouer au bord du marais.

    Loe symbolise la foi dans le progrès. Il croit dur comme fer que la découverte du robot est l’assurance d’un futur meilleur. Et surtout, il ne se laisse pas démonter par le scepticisme de son frère Bo et la désapprobation de sa mère. Grâce à son ingéniosité et à son intérêt pour la technologie, Loe parvient à sortir le robot de son sommeil digital. Ari, pour les intimes, est une prouesse technique dont la mise en marche avait été prévue sur la lune. Et si Ari est capable de s’exprimer, c’est grâce à un polygone – en réalité plutôt un polyèdre – qui ne lui permet, toutefois, pas encore de retrouver sa mobilité.

    Le jeune auteur de bande dessinée, Antoine Pédron, n’est pas dépourvu d’habileté. Mais même si, à certains égards, il brille par ses forces, il ne parvient pas toujours à cacher ses faiblesses. L’atout principal d’Antoine Pédron est sa maîtrise de la couleur et sa capacité à créer un univers fantastique et cohérent. Du paysage foisonnant à l’agencement de la maison, tout semble pensé pour proposer un décor hors norme qui fait directement voyager le lecteur. Et pour appuyer encore la personnalité de son univers, l’auteur mise sur ses talents de coloriste en jouant sur des associations de teintes aussi singulières que séduisantes.

    Mais les décors sont tellement impressionnants qu’ils font de l’ombre aux personnages. Dans un style cartoonesque assumé, les acteurs de son histoire pèchent par manque de précision. Cette qualité qu’on lui retrouve dans la scénographie manque à ses personnages qu’on peine à différencier les uns des autres. Narrativement, Antoine Pédron parvient à éviter l’écueil de la dystopie numérique classique en proposant une lecture axée sur les attentes et les sensibilités des êtres humains plutôt que sur l’éternel désenchantement du progrès. Le sel de Polygone se joue dans les interactions entre les concernés qui posent tous un point de vue différent sur la situation. Mais il arrive parfois que les positions stagnent et que les dialogues se répètent.

    Cheyenne Quévy
    Cheyenne Quévy
    Responsable littérature

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    PolygoneScénario : Antoine PédronDessin : Antoine PédronÉditeur : DargaudDate de parution : 12 septembre 2025Genre : Fantastique Imaginez un monde où les robots géants ne sont pas le futur, mais le passé. Un monde dans lequel l’espoir d’un salut numérique a laissé place à la désillusion. Fatigués...Polygone, un robot en eaux troubles