Pater aux Riches Claires : comprendre l’absence du père

De et avec Barbara Sylvain. Du 25  janvier au 10 février 2018 au Riches Claires.

Les derniers mots de son père furent « Tu sais, je suis blanc comme neige ». Nous sommes en 1981 et Barbara Sylvain a 14 ans. Elle vient de perdre (au sens propre comme au figuré) son père, condamné à 2 mois de prison pour avoir photographié, de manière érotique, de trop jeunes filles. Avec Pater, elle propose au public, son long processus de réflexion quant à la relation complexe qu’elle a avec le père.

Pour (dé)sacraliser cette relation entre un père et sa fille, Barbara Sylvain choisit la performance. Elle va tout d’abord, au moyen de saynètes plus ou moins drôles, pathétiques ou émouvantes, explorer plusieurs thèmes comme la compassion, la vengeance, etc. Mais pour symboliser ce père perdu, l’actrice accueille chaque soir un homme différent, âgé de 65 à 75 ans, comédien totalement amateur et mis au courant de ce qu’il doit faire quelques heures avant le spectacle.

Ce procédé original apporte fraîcheur mais aussi parfois, incompréhension. Si l’actrice est si directe avec son partenaire, est-ce la comédienne qui le stimule un peu trop sauvagement ou la fille qui devenue adulte ne prend pas de gants avec cette image de père ? Si parfois, il ne participe que peu à l’avancée de la performance, est-ce parce qu’il n’est pas préparé à l’expérience ou l’interprète laisse cette figure de l’absence volontairement en retrait au profit de sa propre vie ? Malgré tout, on s’interroge sur l’impact que les différents « pères » peuvent avoir sur les représentations. Tous différents, ils doivent autant amener leurs particularités sur scène comme influencer le jeu de l’actrice. Au final, ne voir le spectacle qu’une seule fois est un peu une frustration (surtout en voyant la variété des visages dans le programme ou la vidéo ci-dessous).

L’enchaînement des segments qui composent la pièce et leur contenu peuvent parfois décontenancer par leur teneur et leur utilité dans la thématique du spectacle. Mais c’était sans compter sur le final que Barbara Sylvain nous a concocté : un remarquable monologue tout en sincérité et en émotion, rassemblant toutes les pistes lancées tout au long de la représentation. Une conclusion qui fait oublier les errances du spectacle.

A propos Loïc Smars 484 Articles
Fondateur et rédacteur en chef du Suricate Magazine